Apparue il y a une petite vingtaine d'années, l'hypothèse qui associe un tiers des dépressions à des perturbations inflammatoires est désormais admise. D'autant plus que trois méta-analyses, publiées dans « JAMA Psychiatry », « Acta Psychiatrica Scandinavica » et « Molecular Psychiatry », apportent de nouveaux éléments à même de la conforter.
Les deux premiers travaux concernent des marqueurs permettant de mieux identifier les patients souffrant de dépression d'origine inflammatoire, le troisième décrit l'effet antidépresseur des anti-cytokines – des agents biologiques puissants communément utilisés pour traiter certaines maladies rhumatismales et auto-immunes. Pour le Dr Guillaume Fond, psychiatre à la clinique Jeanne d'Arc (Paris), membre de la fondation FondaMental et enseignant-chercheur à l'université Paris-Est, l'idée est désormais de « redécouper la dépression en plusieurs sous-types, dont le sous-type inflammatoire (et) de pouvoir ainsi proposer des traitements plus adaptés ». Il a ainsi été suggéré que de petites doses d'anti-inflammatoires pourraient être ajoutées aux traitements antidépresseurs habituels des patients.
Origine incertaine
Si la piste de l'inflammation du cerveau comme cause possible de la dépression semble se préciser, son origine reste cependant incertaine. Elle pourrait être liée à une exposition à certains agents infectieux pendant la grossesse, la petite enfance ou l'adolescence ou bien encore résulter d'une obésité abdominale, voire d'une perturbation du microbiote qui augmenterait la perméabilité de l'intestin et laisserait entrer des agents infectieux dans la circulation. Il par ailleurs été montré que des personnes ayant subi des traumatismes psychologiques pendant l'enfance présentaient également un niveau élevé de marqueurs inflammatoires.
Selon le Dr Fond, il existerait chez toutes ces personnes « un défaut d'extinction de l'inflammation initiale. Celle-ci perdurerait à bas bruit dans la circulation sanguine, ce qui avec le temps augmenterait la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique, générant des perturbations qui pourraient être à l'origine de certaines maladies mentales ».
Anti-cytokines à l'étude
À l’heure actuelle, certaines équipes se penchent sur les bénéfices secondaires des anti-cytokines qui ont déjà pu montrer un effet antidépresseur significatif. À défaut d'essais cliniques pour évaluer leur efficacité et leurs effets secondaires chez des patients sans affection somatique, il est encore trop tôt pour dire si celles-ci pourraient être utilisées en clinique pour traiter la dépression. « On en est à un stade où il faut apprendre à mieux caractériser les patients », précise le Dr Fond qui rappelle qu'il n'y a pour le moment « pas de consensus concernant les différents marqueurs à rechercher, et concernant leur seuil ». Si plusieurs marqueurs de l'inflammation existent (l'interleukine-1, l'IL-6, le TNF-α, la CRP…), le Dr Fond et ses collègues envisagent déjà d'étudier l'administration d'anti-IL-1 chez des patients dépressifs présentant des taux élevés de l'interleukine. Ils bénéficieront pour cela des données d'une biobanque constituée à partir des prélèvements de patients consultant dans les Centres experts dépression résistante.
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