Plus de 3 300 kilomètres parcourus, 21 étapes… Le Tour de France démarre ce samedi 5 juillet 2025 depuis Lille. Défi sportif et événement populaire, il n’est pas exempt de défis médicaux.
Entourée sur « la grande boucle » d’une trentaine de professionnels de santé - médecins urgentistes ou réanimateurs, chirurgien, radiologue, infirmiers anesthésistes, kinésithérapeute, ambulanciers -, la Dr Florence Pommerie, directrice médicale du Tour, prépare minutieusement depuis plusieurs mois l’organisation.
Deux temps forts rythmeront chacune des étapes : le passage de la caravane et la course elle-même. « J’ai souhaité étoffer la médicalisation de la caravane en passant d’une à trois ambulances – l’une en tête, l’autre au milieu et la troisième positionnée après le dernier char - car il y a beaucoup de monde sur le parcours. Par ailleurs, les pompiers et les SMUR locaux ont des difficultés à accéder à la route car elle est privatisée », souligne cette spécialiste en médecine d’urgence et de catastrophe.
Après avoir exercé comme praticien hospitalier au SAMU 93 pendant vingt-cinq ans, elle a quitté cette fonction en 2019 pour se consacrer exclusivement à celle de directrice médicale de la société de rapatriements sanitaires Mutuaide Assistance, poste qu’elle occupe depuis 2003. C’est dans ce cadre qu’elle intervient aujourd’hui sur le Tour. « Suite à un appel d’offres d’Amaury Sport Organisation qui organise de nombreux événements sportifs internationaux, remporté par Mutuaide Assistance, j’ai commencé à assurer la direction médicale du Dakar en 2006 puis celle du Tour de France en 2010 », explique-t-elle.
Assurer la prise en charge, tant auprès des spectateurs que des cyclistes
Cette année, chaque ambulance compte un urgentiste ou un réanimateur et un infirmier anesthésiste, soit l’équivalent d’un SMUR avec le même matériel, prêts à intervenir auprès des caravaniers ou du public, en coopération avec les secours locaux. « Il fait souvent très chaud. Celles et ceux qui assurent le spectacle pendant plusieurs heures peuvent ressentir des malaises. Et puis il y a les spectateurs qui prennent parfois des risques inconsidérés, traversant la route pour récupérer des goodies ou lâchant la main de leurs tout-petits pour faire coucou à l’hélico ! », note le médecin.
Entre le passage de la caravane et celui des cyclistes, la vigilance reste également de mise pour parer, par exemple, à un accident de voiture d’un journaliste ou d’un invité. « Nous avons donc placé une quatrième ambulance devant le départ de la course. C’est un peu notre couteau suisse. Puis pendant chaque étape, trois autres ambulances, deux cabriolets et une moto médicalisés sont mobilisables. La moto sert aux échappées car il est compliqué pour un véhicule de doubler un peloton. En cas de besoin, je peux aussi recourir à mon ambulance « couteau suisse » qui est positionnée à l’avant », poursuit Florence Pommerie.
Un challenge également logistique
Pour l’équipe aguerrie aux situations d’urgence, la difficulté n’est pas l’exercice de la médecine mais… la gestion de la logistique. « Dans les descentes de montagne, nous devons être à proximité des cyclistes, ce qui implique de les doubler en montée. Mais dans ce cas, ils ont tendance à se positionner juste derrière nous pour bénéficier de l’appel d’air, ce qui est interdit. Nous devons donc demander aux commissaires l’autorisation de doubler », cite en exemple la directrice médicale. Un autre de ses points d’attention concerne les sprints « qui sont de plus en plus nombreux. Les coureurs, dont l’attention est de surcroît de plus en plus accaparée par différentes données techniques, renvoient souvent l’image d’un essaim d’abeilles qui se déplace… à 80 ou 90 km/h. Avec les freins à disque, ils reconnaissent eux-mêmes qu’ils n’entendent plus les freinages. Si l’un d’eux tombe, le danger est l’effet domino or nous n’avons finalement que trois ambulances. C’est un vrai sujet. Heureusement, des décisions ont été prises pour calculer les classements quelques kilomètres avant les sprints, ce qui incite à ralentir la vitesse ».
À l’arrivée des étapes, la mobilisation continue
Un centre médical mobile offre la possibilité, à l’arrivée de chaque étape, de réaliser échographies et radiographies, ou encore de recueillir l’avis d’un chef de service en orthopédie, un dispositif particulièrement apprécié qui permet d’éviter l’engorgement de services d’urgence hospitaliers et de préserver les coureurs d’une trop grande fatigue.

Les médecins du Tour travaillent également en parfaite collaboration avec leurs collègues des 23 équipes sélectionnées, souvent issus d’autres spécialités – médecine du sport ou de la nutrition notamment - et qui se positionnent à l’arrivée des étapes. « En course, c’est nous qui traitons les urgences et décidons par exemple d’une évacuation, en lien avec le représentant du SAMU, indique la médecin-cheffe. Mais nous avons d’excellentes relations avec nos confrères des équipes ; ils traitent particulièrement bien la gestion de la chaleur, ils apprécient beaucoup notre centre médical mobile au sein duquel nous partageons nos avis et puis nous nous connaissons de mieux en mieux ! »
Si à quelques jours du départ, la pression se fait davantage sentir, elle n’altère en rien le plaisir qui va animer Florence Pommerie pendant trois semaines. « Après une préparation de plusieurs mois pour lister les professionnels de santé, aménager les ambulances, rencontrer de nombreux intervenants et partenaires, nous sommes heureux de nous retrouver dans une belle ambiance, de traverser la France et de découvrir chaque année de nouveaux sites », conclut-elle.
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