La crise de milieu de vie n’affecte pas que notre espèce. Une équipe de chercheurs internationale montre qu’elle touche aussi nos plus proches « cousins » : une étude réalisée chez plus de 500 singes (chimpanzés et orangs-outans) retrouve chez eux le même type de courbe en U qui caractérise le sentiment de bonheur chez l’homme et la femme. Une constatation qui amène à s’interroger : cette fameuse courbe en U serait-elle influencée par des facteurs biologiques non spécifiques de l’humanité, en plus de ceux (socio-culturels/psychologiques) auxquels on la rattache habituellement ?
La courbe en U exprime une réalité à laquelle peu d’entre nous échappe : le sentiment d’être bien dans sa peau commence à fléchir dès 20 ans et jusque vers 40-50 ans (âge auquel la consommation d’anti-dépresseurs et le risque suicidaire sont à leur pic), avant de remonter, de façon aussi spectaculaire, jusque vers 70 ans. Cette courbe est quasi universelle : on l’a observée dans plus de 50 pays, y compris les plus pauvres. Mais comme sa forme n’est pas affectée par de nombreux facteurs économiques et démographiques, l’équipe de Andrew Oswald s’est demandée si des facteurs biologiques n’y contribuaient pas également.
Chimpanzés et orangs-outans.
D’où l’idée de cette enquête chez des primates non humains. Trois groupes de singes ont été soumis (via leurs gardiens, des volontaires ou des chercheurs qui connaissaient les animaux depuis au moins deux ans) à un questionnaire très proche de celui qui évalue le sentiment de bonheur chez l’homme. Les analyses de régression multiple conduites dans l’échantillon A (155 chimpanzés recrutés dans des zoos et un sanctuaire japonais), l’échantillon B (181 chimpanzés de zoos australiens et américains) et l’échantillon C (172 orangs-outans provenant de divers zoos dans le monde) mettent en évidence une courbe en U, avec un sentiment de bonheur au plus bas aux âges de 28,3, 27,2 et 35,4 ans, respectivement dans chaque groupe. Une quatrième analyse de régression, conduite sur l’ensemble des singes (n = 508) retrouve la même tendance, avec un âge moyen, au tournant de la courbe en U, de 31,9 ans.
C’est la première fois qu’on retrouve une telle similitude entre l’espèce humaine et les singes. Comment l’expliquer ? On peut se demander si cette courbe en U reflète des altérations liées à l’âge au niveau de certaines structures cérébrales en relation avec le sentiment de bien-être. Il est aussi possible que, dans l’espèce simienne comme dans l’espèce humaine, les adultes atteignant un certain âge recherchent des situations ou des groupes sociaux où trouver des émotions positives, ou se concentrent sur des objectifs plus réalisables et donc ayant plus de chances de succès.
Cette étude souligne en tout cas l’intérêt d’accorder plus de place, à l’avenir, aux aspects neuro-développementaux communs aux êtres humains et aux autres primates dans l’étude de l’évolution des facteurs prédictifs de bien-être au cours de la vie.
Andrew J. Oswald et coll. Evidence for a midlife crisis in great apes consistent with the U-shape in human well-being. Proc Natl Acad Sci USA (2012). Publié en ligne.
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