Dr Patrick Sichere, rhumatologue à Paris

La place croissante des traitements non médicamenteux

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Publié le 21/04/2020
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La douleur persistante en rhumatologie étant plurifactorielle, la stratégie thérapeutique repose sur l’association d’approches complémentaires afin d’améliorer la qualité de vie du patient. Alors que l'arsenal médicamenteux se réduit, d'autres techniques se développent...

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Une cure thermale adaptée entraîne une rupture bénéfique avec le quotidien

Une cure thermale adaptée entraîne une rupture bénéfique avec le quotidien
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Où en est-on concernant les thérapeutiques médicamenteuses ?

Dr Patrick Sichere. Notre arsenal médicamenteux se réduit. Les antalgiques disponibles sont de moins en moins nombreux (suppression du dextropropoxyphène) et présentent davantage de restrictions d’utilisation dues à leurs effets secondaires. Les AINS restent intéressants en cas de poussées inflammatoires dans l’arthrose ou la polyarthrite, en évaluant bien au préalable les risques hépatiques et cardiovasculaires du patient. Dans certains cas, les doses doivent être adaptées pendant une période allant, par exemple, jusqu’à 15 jours dans un premier temps. Le tramadol ne pourra désormais être prescrit que pour trois mois à partir d’avril 2020, en raison du risque de dépendance. Même si en France, la « crise des opioïdes » n’a rien à voir avec celle rencontrée aux États-Unis, il faut rester vigilant. La prise en charge d'une douleur persistante au-delà de trois mois (on ne doit plus parler désormais de douleur chronique), repose sur l’évaluation et la recherche des mécanismes de la douleur, qui peuvent être très différents chez les patients consultant en rhumatologie. À côté des douleurs nociceptives et neuropathiques, on parle aujourd’hui de douleurs nociplastiques, autrefois dénommées idiopathiques ou fonctionnelles, qui résultent d’une perturbation des systèmes de contrôle de la douleur au niveau central (par exemple, la fibromyalgie). Mais très souvent, la douleur persistante est d’origine mixte. À côté des antalgiques classiques, les antiépileptiques et les antidépresseurs tricycliques, qui favorisent notamment le sommeil, gardent ainsi toute leur place. 

Et le cannabis thérapeutique ?

En rhumatologie, les études sont assez limitées et jusqu’à présent plutôt décevantes. En juillet 2020, une expérimentation de six mois sera lancée par l’ANSM dans certaines indications. Les médecins prescripteurs seront des spécialistes, volontaires et formés spécifiquement sur le sujet. Ils pourront prescrire du cannabis dans des indications bien spécifiques : les douleurs chroniques (suivies dans des centres de lutte contre la douleur), neuropathiques rebelles aux traitements classiques (sciatiques, séquelles de chirurgie du rachis ou du canal carpien…) et liées à une sclérose en plaques. Nous espérons avoir enfin des données plus précises sur son efficacité. 

Quelles prises en charge non médicamenteuses se développent aujourd'hui ?

Les traitements non médicamenteux prennent une place croissante dans la prise en charge des patients en rhumatologie. Les recommandations de l’EULAR donnent d’ailleurs la priorité à une prise en charge non pharmacologique, notamment dans le traitement de la fibromyalgie. L’activité physique régulière (marche nordique, randonnée, pilates…), les thérapies cognitivo-comportementales, l’hypnose, la méditation en pleine conscience, les cures thermales sont reconnues, entre autres, comme ayant un effet antalgique démontré.   

Une cure thermale adaptée entraîne notamment une rupture bénéfique avec le quotidien. Pendant trois semaines de soins thermaux associés à des ateliers d’éducation thérapeutique, le patient apprend à penser et à agir autrement. Des techniques de relaxation et de sophrologie l’aident à reprendre confiance et à vivre mieux malgré la douleur. Souvent, cela lui permet de retrouver le sommeil, puisqu'il est  intimement lié à la douleur persistante. Si les douleurs entraînent des troubles du sommeil, on sait maintenant que l'inverse est également possible.

La neurostimulation transcutanée est amenée à se développer car on dispose aujourd’hui de systèmes beaucoup plus pratiques comme un patch autocollant, léger et confortable permettant d’améliorer l’adoption du traitement par les patients. Enfin, la stimulation magnétique transcrânienne qui a déjà fait ses preuves dans des douleurs neuropathiques rebelles et la fibromyalgie, vient de montrer pour la première fois un effet antalgique dans la gonarthrose. Ces résultats sont très encourageants.

Quelles sont les pistes de recherche ?

Il y a un nombre croissant de travaux sur le microbiote intestinal, dont le rôle semble de plus en plus important dans les fonctions digestives, immunitaires, inflammatoires et neurologiques. On a observé un lien entre un déséquilibre du microbiote, la maladie de Crohn et la spondylarthrite. Enfin, longtemps oubliées dans la physiologie du système nerveux central au profit des cellules neuronales, les cellules microgliales reviennent à l’ordre du jour pour leur rôle dans la douleur. Elles seraient notamment activées dans le cerveau des personnes atteintes de fibromyalgie, provoquant une inflammation cérébrale.         

Propos recueillis par Christine Fallet

Source : lequotidiendumedecin.fr