Le sommeil est perturbé sur un plan quantitatif avec une durée totale diminuée la nuit ou sur les 24 heures, ou au contraire augmentée, avec souvent une inversion des rythmes veille/sommeil responsable d’une somnolence diurne excessive. Sur un plan qualitatif, le sommeil est souvent fragmenté, avec des éveils fréquents et prolongés, une diminution drastique des phases de sommeil récupérateur (sommeil à ondes lentes et sommeil paradoxal). Néanmoins, l’évaluation polysomnographique des phases du sommeil reste difficile et discutable dans le contexte de la réanimation (encéphalopathie, sédation…).
Les causes de ces troubles sont multiples et souvent intriquées, impliquant des facteurs personnels (âge, sexe féminin, antécédents d’insomnie), pathologiques (douleur, delirium, stress, troubles de l’humeur), environnementaux (bruit, lumière, soins nocturnes) ou encore thérapeutiques (ventilation mécanique mal réglée, sédation-analgésie inappropriée, corticoïdes).
Les conséquences à court terme sont potentiellement sérieuses en réanimation (réponse de stress accrue, immunosuppression, déséquilibre neuro-endocrinien…) ; le lien avec le delirium est étroit et bidirectionnel ; les conséquences à long terme sont aussi fréquentes, associant troubles persistants du sommeil (insomnie, inversion des rythmes veille sommeil, somnolence diurne), troubles psychologiques (anxiété, dépression, syndrome de stress post-traumatique) et une moins bonne qualité de vie ressentie.
En réanimation, le traitement doit avant tout être préventif : prévention de la privation de sommeil de nuit, du stress, de la douleur et du delirium, mobilisation active précoce des patients la journée afin d’augmenter les contrastes entre la nuit et le jour et ainsi entre la veille et le sommeil, respect des indications strictes de la sédation, analgésie et anxiolyse titrées, réduction des stimulations nocturnes sonores et lumineuses (alarmes, conversations, soins, lumière, proposition de bouchons auriculaires et masque oculaire).
Le réglage du ventilateur doit faire l’objet d’une attention accrue la nuit ; il faut éviter l’hyperventilation et l’alcalose, la fatigue musculaire et l’asynchronie.
En cas de perte répétée du sommeil de nuit induite par l’environnement, il faut penser à anticiper ce problème en accentuant les stimulations cognitives et physiques le jour, en évitant tout épisode de somnolence le jour, y compris la sieste, ainsi que la prise de psychotrope ; une supplémentation nocturne en mélatonine constitue une voie de recherche prometteuse dans cette population en cas d’échec de cette prise en charge.
Pour induire le sommeil, diverses méthodes non médicamenteuses dont la relaxation seraient à privilégier ; la prescription d’hypnotiques devrait être le plus possible limitée car pourvoyeuse d’une désorganisation de l’architecture du sommeil avec diminution du sommeil profond à court terme, ainsi qu’une tolérance et une dépendance aux hypnotiques à moyen terme.
La place de la polysomnographie et des biomarqueurs précisant la présence et la sévérité de la privation de sommeil ainsi que des troubles du sommeil et leurs étiologies restent encore du domaine de la recherche mais représentent néanmoins les enjeux de demain afin de mieux préciser ces troubles, leur pronostic et leur prise en charge.
Hôpital Saint-Eloi, CHRU Montpellier
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