« On parle depuis longtemps d’éducation nutritionnelle, plutôt que d’éducation alimentaire. Mais alors on oublie le principal ! Pourquoi mange-t-on ? Est-ce utile ? Cela peut-il faire plaisir ? » C’est en ces termes que Catherine Dijuste, nutritionniste, introduit le débat sur la fonction de la faim. « Aujourd’hui, tous les journaux nous invitent à ne pas avoir faim, à manger avant de la ressentir, mais se battre contre la faim est une hérésie : la faim est utile, elle nous indique que le corps a besoin d’énergie », ajoute-t-elle. Oui, mais. Il y a faim et faim. Et il est fondamental d’apprendre à comprendre cette sensation. Au départ, la faim biologique est la conséquence d’un système de régulation énergétique interne, entre apports et dépenses. L’hypothalamus, renseigné par des capteurs présents dans la masse grasse, envoie la sensation de faim. Cependant, ce système parfait en théorie peut se déréguler, et ce pour deux raisons. La première, c’est lorsque l’on en vient à confondre faim biologique et faim émotionnelle. « En effet, explique Catherine Dijuste, à la naissance, la faim émotionnelle est la norme : le bébé se nourrit de lait, de chaleur et d’amour, et si tout se passe bien, la nourriture égale confort. » Mais en grandissant, cela se complique quelque peu : soit on apprend à gérer ses émotions pour réguler son humeur interne, soit on continue à utiliser la nourriture pour oublier son mal-être. La nourriture calme, certes, mais pour combien de temps ? La personne tente de retrouver l’état de sécurité de l’enfance, mais sans succès. « Se séparer de la nourriture revient à se séparer des bras de sa mère », résume la nutritionniste.
Diktats externes
Autre facteur de dérégulation, la volonté de contrôler son alimentation avec des pensées, sans tenir compte de ses perceptions sensorielles. Exemples : je n’ai pas faim mais je dois manger, j’ai encore faim mais je ne dois plus manger… « Cette non prise en compte des besoins alimentaires, ces stratégies de contrôle comme la réduction, l’évitement et la compensation entraînent obligatoirement des émotions négatives », précise Catherine Dijuste. Anxiété, frustration, culpabilité, insécurité… Autant de sentiments qui ne permettent pas d’aborder sereinement la question de l’alimentation. Et qui nuisent à la perception de la faim biologique. Cette dernière se développe lentement, est capable d’attendre pour être apaisée, induit du bien-être, se satisfait d’un bout de pain ou encore, résulte d’un déclencheur biologique. La faim émotionnelle, quant à elle, surgit de façon intense et subite, réclame une satisfaction immédiate, préfère un gâteau, induit de la culpabilité et résulte d’un déclencheur psychologique. Des différences fondamentales, qui invitent aujourd’hui à préférer l’éducation alimentaire à l’éducation nutritionnelle : « se nourrir doit être un moment de plaisir, de partage et de convivialité, et ne vise pas seulement à ingérer des protéines ou des féculents. En outre, conclut Catherine Dijuste, il est nécessaire de travailler à une gestion « de l’intérieur » de l’acte alimentaire, et non par le biais de diktats externes ».
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