BON CARACTÈRE, joli teint, les carottes recèlent mille vertus pour la santé, dont la dernière en date n’est pas la moindre. Selon une étude américaine menée sur plus de dix ans, des taux sériques d’alpha-carotène élevés diminuent la mortalité toutes causes. Mais ce n’est pas tout, l’équipe du Dr Liu, de l’université de Californie à Los Angeles, a également observé que le caroténoïde diminue la mortalité spécifique par cancers et de cause cardio-vasculaire. Voilà de quoi relancer la promotion des fruits et légumes, et en particulier des carottes puisque près de 75 % des apports proviennent de ces savoureuses racines colorées. L’alpha carotène est un anti-oxydant 10 fois plus puissant in vitro que le bêta-carotène, un caroténoïde bien plus étudié ces dernières années.
Suivi médian d’environ 14 ans
Les chercheurs californiens ont construit leur travail sur l’analyse d’une étude nutritionnelle américaine sur plus de 20 ans, la Third National Health and Nutrition Examination Survey Follow up (NHANES III). Ce sont ainsi les données de 15 318 sujets âgés de plus de 20 ans, qui ont été prises en compte. La durée médiane de suivi est de 13,9 ans. Les caractéristiques démographiques des participants étaient recueillies à l’interrogatoire : appartenance ethnique (caucasienne, afro-américaine, mexicaine ou autres), niveau d’éducation (collège, lycée, université), tabagisme (actif, sevré, ou non-fumeur), consommation d’alcool (estimée sur le mois précédent). L’activité physique était estimée en fonction par le temps consacré au cours du mois précédent multiplié par la dépense énergétique. L’indice de masse corporelle était calculé après mesure du poids et de la taille.
Par rapport aux sujets ayant une concentration sérique basse d’alpha-carotène, comprise entre 0 et 1 microg/dl, ceux ayant une concentration plus forte ont une mortalité toutes causes diminuée. Plus la concentration est élevée, plus la mortalité baisse. Ainsi, le risque relatif diminue à 0,77 pour une concentration entre 2 et 3 microg/dl, à 0,73 entre 4 et 5 microg/dl, à 0,66 entre 6 et microg/dl et à 0,61 pour une concentration ≥ 9 microg/d. Dans l’analyse en sous-groupes, l’effet protecteur est retrouvé quelles que soient les caractéristiques démographiques, le mode de vie et les comorbidités associées. La mortalité de cause cardio-vasculaire est significativement diminuée, ainsi que celles par cancer, par diabète et de cause respiratoire.
Des propriétés étonnantes in vitro.
Bien que l’alpha-carotène soit très proche du bêta-carotène sur le plan chimique, ses propriétés in vitro sont sensiblement différentes. Il inhibe 10 fois plus la prolifération cellulaire des neuroblastomes humains. Il présente un effet inhibiteur sur la carcinogénèse hépatique, contrairement au bêta-carotène, qui en est dépourvu, et neutralise davantage l’action du glycérol dans la carcinogénèse hépatique et cutanée.
Les résultats californiens confirment d’ailleurs les données d’une étude de population sur l’association entre consommation de fruits et légumes riches en alpha carotène et risque de cancer du poumon. Une alimentation riche en légumes jaune-orange (carotte, patate douce, citrouille, potiron) et verts (brocoli, épinards, petits pois, navet, chou, laitue) était associée à un risque moindre de cancer pulmonaire.
Dans l’étude du Dr Liu, les taux plasmatiques d’alpha-carotène sont hautement corrélés à la consommation totale de fruits et légumes, en particulier de carottes et de légumes rouges. Les auteurs font remarquer un phénomène curieux concernant la mortalité spécifique. Contrairement aux maladies cardio-vasculaires pour lesquelles la protection maximale est assurée pour des taux très élevés, il est apparu pour la mortalité par cancer que des taux très élevés sont moins efficaces que des taux plus faibles. Un tel constat avait d’ailleurs déjà été tiré pour le bêta-carotène. Il semble ainsi nécessaire de pousser plus loin les recherches, de mieux connaître les concentrations optimales et pour quels effets, et de déterminer ensuite la ration journalière en fruits et légumes à consommer.
Arch Intern Med. 2011;171(6):507-515. doi:10.1001/archinternmed.2010.440.
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