Plainte contre X, constat d’huissier, un médecin en guerre contre les méthodes de sa caisse

Par
Publié le 22/04/2017
plainte contre X

plainte contre X
Crédit photo : PHANIE

Certains enquêteurs de la caisse primaire d’assurance-maladie de la Sarthe ont-ils outrepassé leurs fonctions ? C’est la question posée par le Dr Philippe Lorin. Début février, cet ORL installé au Mans (Sarthe) a porté plainte contre X auprès du tribunal de grande instance de sa ville pour exercice illégal de la profession de médecin. Il reproche à l’un des enquêteurs assermentés de la CPAM d’avoir contesté ses indications thérapeutiques au cours d’un entretien avec l’un de ses patients.

Dans un témoignage recueilli par huissier et auquel « le Quotidien » a eu accès, ce malade reconnaît que l’agent de la CPAM lui a confié qu’il trouvait sa prise en charge « étonnamment longue » et lui a conseillé de « prendre un autre avis médical avant toute opération », alors même que ce patient avait déjà été orienté vers le Dr Lorin par un autre ORL.

« Je ne remets pas en cause le contrôle de la caisse sur mon activité, indique au « Quotidien » le Dr Lorin. Mais je n’admets pas qu’un enquêteur, qui n’est pas médecin, porte un jugement et dénigre auprès de mes patients mes avis thérapeutiques. » L’ORL avait été alerté par plusieurs de ses malades, ce qui l’avait décidé à faire témoigner l’un d’eux devant huissier.

Signalement par des masseurs-kinésithérapeutes 

Après un signalement du Conseil national des masseurs-kinésithérapeutes, la CPAM enquête depuis le mois de septembre 2016 sur les facturations d’actes de rééducations vestibulaires du Dr Lorin, qui reconnaît avoir un chiffre d’affaires trois fois supérieur à la moyenne nationale des ORL.

Le médecin affirme cependant ne pas être en conflit avec la caisse. « C’est peut-être le fait d’un enquêteur zélé qui a outrepassé ses fonctions, un cas isolé », admet-il. Au mois d’octobre 2016, il alerte une première fois la CPAM sur ses observations. En réponse, il lui est confirmé qu’il fait l’objet d’une étude administrative par des agents assermentés. Le médecin sera invité à présenter ses observations à la fin de cette enquête. Rien sur les agissements surprenants de l’un de ces agents.

Une réponse un peu succincte pour le Dr Lorin qui ne lâche pas l’affaire. Au mois de janvier, il relance la caisse dans un courrier où il dénonce les méthodes des enquêteurs, leur reproche de ne pas respecter la loi, d’« abuser de la faiblesse de [ses] malades », d’« exercer illégalement la médecine » et d’« attenter à ses libertés individuelles ».

« Accusations fantaisistes » répond la CPAM

Dans son courrier de réponse, le directeur de la CPAM de la Sarthe rejette en bloc ces accusations qu’il qualifie de « fantaisistes », et ironise sur le « sens dramatique » des reproches formulés par le Dr Lorin. Il décline également l’invitation de ce dernier à venir constater, à son cabinet, la manière dont il travaille mais lui signale qu’il ne manquera pas de lui adresser les notifications de l’enquête dans les prochaines semaines.

Interrogée par « le Quotidien », la caisse de la Sarthe refuse de commenter les accusations du Dr Lorin sur les pratiques de l’un de ses enquêteurs. À ce stade, aucun grief n’a été notifié au praticien, nous dit-on, et les résultats de l’enquête sont en cours d’analyse par le service médical de l'Assurance-maladie, près de huit mois après le début du contrôle.

L’affaire prendra une tournure judiciaire dans les prochains mois après la plainte déposée par les avocats du Dr Lorin. Pour l’ORL, cette démarche n’est pas seulement individualiste. « Je le fais aussi pour défendre la profession, explique-t-il. On est de plus en plus emmerdé par l’administration, on nous prend de haut, on reçoit des leçons en permanence alors que c’est nous qui, tous les jours, recevons les patients. »


Source : lequotidiendumedecin.fr