À quel moment faut-il, chez les jeunes enfants, entamer une diversification alimentaire avec des produits à fort potentiel allergénique ? Cette question était au cœur de recommandations publiées en 2008 par le Comité nutrition de la Société Française de Pédiatrie (SFP). « La diversification alimentaire ne doit pas débuter avant l’âge de 6 mois. L’introduction de l’œuf et du poisson peut débuter après 6 mois, mais celle des aliments à fort pouvoir allergénique (kiwi, céleri, arachide, fruits à coque, crustacés) doit être retardée après 1 an », soulignait la SFP, dans ce texte publié en mai 2008 (1).
Mais le docteur Marc Bellaiche, gastropédiatre à l’hôpital Robert Debré, estime que, depuis, la situation a évolué, notamment après la publication, toujours en 2008, de recommandations émanant cette fois de la Société européenne de gastroentérologie pédiatrique (ESPGHAN). « Aujourd’hui, le message clé est qu’entre 3 et 6 mois, il faut introduire tous les aliments, que les enfants soient ou non allergiques », indique-t-il, en précisant que plusieurs études épidémiologiques internationales plaident en faveur de ce changement d’approche.
« Une première étude marquante s’est intéressée à la fois à la Grande-Bretagne et à Israël, deux pays ayant une pratique de la diversification alimentaire très différente. En Grande-Bretagne, il y a une interdiction absolue de faire consommer tout aliment à base de cacahuète à des enfants de moins de 3 ans. En Israël, au contraire, la cacahuète est utilisée de manière abondante dans différentes solutions de nutrition infantile. Or, après 10 ans d’observation, on s’est rendu compte que le taux d’allergie à l’arachide était 20 fois plus élevé en Grande-Bretagne qu’en Israël », explique le Dr Bellaiche, qui cite aussi l’étude Lisa conduite en Suède. « Cette fois, on a comparé des populations du nord du pays qui consomment très tôt beaucoup de poissons à des populations du sud qui en consomment de manière plus tardive. Or, là encore, on a constaté que les allergies étaient nettement moins nombreuses au Nord. D’autres travaux ont aussi montré que des enfants qui commençaient à consommer du gluten après 7 mois, faisaient davantage de maladies cœliaques que les enfants qui en consommaient entre 4 et 7 mois », explique le Dr Bellaiche.
Ces études conduisent donc, selon lui, à remettre en cause le postulat selon lequel l’éviction est le maître mot dans la prévention de l’allergie. « Dans ses recommandations de 2008, le comité nutrition de l’ESPGHAN constate qu’il n’existe pas de preuve scientifique convaincante permettant d’affirmer que le fait d’éviter ou de retarder l’introduction d’aliments avec un potentiel allergénique – comme le poisson ou les œufs – réduise le risque de développer des allergies. Leur recommandation est de procéder à une diversification avec des aliments solides à partir de 17 semaines et pas après 26 semaines », indique le Dr Bellaiche.
D’après un entretien avec le Dr Marc Bellaiche, gastropédiatre à l’hôpital Robert Debré à Paris.
(1) Alimentation des premiers mois de vie et prévention de l’allergie. Comité nutrition de la Société française de pédiatrie.
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