Sur les 9 millions de personnes qui, chaque année, attrapent la tuberculose, un tiers ne le sait pas. Parmi elles, deux tiers des malades infectés par une souche multirésistante ou ultrarésistante. La journée mondiale de lutte contre la tuberculose est l’occasion pour l’OMS d’appeler à une mobilisation pour permettre à ses 3 millions de personnes d’avoir accès au diagnostic et au traitement.
Le défi de la résistance
« Les deux cibles des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) consistant, d’ici 2015, à inverser la tendance concernant l’incidence de la tuberculose, et à réduire de 50 % le taux de mortalité (par rapport à 1990) sont en bonne voie », conclut l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans son dernier rapport d’octobre 2013. L’évolution au cours des dernières décennies a en effet confirmé les progrès de la lutte contre la maladie avec une baisse de la mortalité (45 % entre 1990 et 2012) et un infléchissement de l’incidence (baisse de 2 % par an). Près de 9 millions de personnes dans le monde ont contracté une tuberculose et 1,3 million de personnes en sont mortes en 2012.
Des points noirs émergent cependant de ce bilan plutôt positif. Un tiers des neuf millions de personnes contractant la tuberculose chaque année échappe aux systèmes de santé et ne bénéficie d’aucun soin. Et parmi elles, des malades atteints de formes résistantes aux antituberculeux. En 2012, 45 000 cas ont été recensés chez des patients atteints de tuberculose pulmonaire. Et près de 9,6 % de ces cas de tuberculose multirésistante (TB-MR) sont en fait des tuberculoses ultrarésistantes (TB-XDR).
L’OMS estime que près de deux tiers des patients atteints de ces formes résistantes ne sont pas diagnostiqués et échappent également au système de santé. Si tous les pays sont touchés, 3 d’entre eux regroupent la moitié des cas survenus dans le monde : l’Inde, la Chine et la Fédération de Russie.
La mise à disposition de tests de diagnostic rapide de la tuberculose-MR délivrant un résultat en à peine 2 heures (au lieu des deux mois nécessaires avec les tests classiques) apparaît comme une importante avancée. Le projet Expand-TB* (Étendre l’accès à de nouvelles méthodes de diagnostic de la tuberculose) financé par UNITAID a permis de tripler le nombre de cas de tuberculoses résistantes dans 27 pays à revenu faible ou intermédiaire. Le projet vise à augmenter les capacités en laboratoire de ces pays grâce à l’achat de matériel, de fournitures et à la formation de techniciens.
Des traitements complexes et coûteux
Toutefois la multirésistance demeure un défi en particulier en raison de la difficulté de la prise en charge des formes résistantes aux deux antituberculeux de première ligne, l’isoniazide et la rifampicine. Ces forme exigent des traitements plus lourds, plus coûteux traitements de deuxième ligne), plus longs et avec plus d’effets secondaires. Dans « The lancet », Keertan Dheda et col. soulignent que dans un pays comme l’Afrique du sud ou les souches multirésistantes et ultrarésistantes ne représentent que 3 % des cas signalés, leur prise en charge grève de 35 % le budget alloué au programme national de lutte contre la tuberculose.
Dans le bulletin « Eurosurveillance », M. J. van der Werf et M. Sprenger de l’ECDC (European center for Disease Prevention and Control) notent que la vigilance est de mise même si les taux de résistance en Europe restent similaires à ceux enregistrés au niveau mondial (2,6 % contre 3,4 % des nouvelles infections ; 18,8 % contre 19,8 % parmi les patients déjà traités). Entre 2007 et 2012, le phénomène est resté stable avec 90 % de souches sensibles, 6 % de souches résistantes à un antituberculeux, 2 % de souches résistantes à plusieurs antituberculeux, 2 % de souches multirésistantes et 0,2 % de souches ultrarésistantes. Ces dernières ont été signalées même dans les pays de faible incidence.
L’Europe de l’Est
Par ailleurs, au sein même de la région, certains pays notamment en Europe de l’Est (les 3 pays baltes présentent les taux les plus élevés de TB-MDR) et ses environs. La Géorgie, pays du Caucase située à la frontière entre l’Europe et l’Asie, a une situation particulière. Une étude présentée dans « Eurosurveillance » montre que le risque de multirésistance y est élevé (11 % parmi les patients naïfs ; 32 % des patients déjà traités) en particulier dans les villes et en milieu pénitentiaire malgré la mise en place d’un programme de surveillance de la tuberculose et d’un accès universel aux traitements et au diagnostic. L’accueil de patients venant de Georgie explique en grande partie l’augmentation des souches résistantes en 2011 et 2012 observée en France.
La tuberculose multirésistante résulte la plupart du temps d’un traitement inadapté en raison de l’utilisation inappropriée ou incorrecte des antituberculeux, d’un recours à des médicaments de médiocre qualité, d’une rupture de traitement. Toutefois Keertan Dheda et col. signalent dans « The Lancet » une possible apparition de tuberculose chez des patients ayant une observance correcte dont le traitement est sous stricte supervision en raison d’une pharmacocinétique propre aux moclécules ou chez certains patients qui métabolisent plus vite les antituberculeux comme les acétyleurs rapides. L’arrivée de nouvelles molécules est une partie de la réponse à cette menace car précisent les auteurs, celle-ci doit être globale et passe par l’accès de tous à ces molécules et par la lutte contre la pauvreté.
*Les partenaires du projet sont l’OMS, l’Initiative mondiale pour les laboratoires, le Service pharmaceutique mondial du Partenariat Halte à la tuberculose et la Fondation pour des outils diagnostiques nouveaux et innovants (FIND).
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