L'exposition aux produits de nettoyage désinfectants à la maison et sur le lieu de travail concerne toujours une majorité de femmes. Et les niveaux d'exposition peuvent être très élevés en particulier dans l'industrie et dans le secteur de la Santé. Leur impact sur le système respiratoire est de plus en plus reconnu. Mais la plupart des travaux se sont focalisés sur l'asthme même si quelques études européennes ont déjà soulevé le problème de la BPCO. « Jusqu'ici a priori aucune étude ne s'était intéressée au personnel de santé ni mis en lien leur exposition aux produits de nettoyage et le risque de BPCO. Cette étude montre que ces produits semblent être des facteurs indépendants de risque de développer une BPCO. En effet ni le tabac ni l'asthme ne modifient l'association », résument les auteurs.
Plus de 70 000 infirmières suivies 6 ans
La NHS a été initiée en 1989 mais le questionnaire sur le lieu et les conditions de travail n'a été inclus dans le suivi qu'en 2009, l'étude porte donc sur les données recueillies entre 2009 à 2015. Soit plus de 73 000 infirmières toujours en activité et sans BPCO initiale en 2009. Ces femmes avaient 55 ans en moyenne en 2009 et la grande majorité (96 %) est de race blanche. Elles travaillent dans l'administration, à domicile, dans les unités de soins ou au bloc et ont un usage varié des produits de nettoyage désinfectants. Globalement 23 % d'entre elles ne nettoient que des surfaces quand 20 % a contrario ne nettoient que du matériel médical.
Un surrisque de BPCO de l’ordre de 30 %
6Au total durant ce suivi de 6 ans (368 000 patientes années) 582 infirmières ont développé une BPCO. Après ajustement sur l'âge, le tabagisme, la race et l'IMC, l'usage de désinfectants majore le risque de développer une BPCO de 35 % (RR = 1,35 [1,14-1,59]).
Pour l'usage de nettoyants de surface seuls (23 % de la cohorte) le surrisque est de 38 % (RR = 1,38, [1,13-1,68]). Pour l'usage de nettoyants pour instruments médicaux seuls (19 % de la cohorte) ce surrisque est de 31 % (RR = 1,31 [1,07-1,61)).
Plus le recours à ces produits est fréquent, plus le risque augmente. Quand ils sont utilisés 4 à 7 fois par semaine, le surrisque globalement lié aux nettoyants pour surface et pour instruments médicaux passe à 43 % (RR = 1,43; [1,13-1,80]). Soit un effet dose réponse.
Enfin cette association entre exposition aux produits de nettoyage est retrouvée les infirmières qui n'ont jamais fumé, chez les fumeuses, chez les asthmatiques et les non asthmatiques.
De nombreux produits en cause
Les auteurs ont aussi analysé dans un modèle particulier l'impact de sept désinfectants considérés comme les plus courants sur le risque de BPCO.
Les désinfectants type glutaraldéhyde, eau de javel, eau oxygénée, alcool, ammonium quaternaire semblent avoir un impact sur le risque de BPCO. Il est néanmoins restreint aux fortes expositions. Une exposition élevée induit un surrisque de l'ordre de 25 % (RR = 1,25 [1,04-1,51]). Les expositions faibles ou modérées n'en induisent pas. En revanche, pour les désinfectants enzymatiques nul surrisque n'a été retrouvé.
« Il faut noter que l'utilisation de plusieurs produits était fréquente. L'impact de chaque constituant reste donc difficile à définir, nuancent les auteurs. Le plus haut risque de BPCO a toutefois été retrouvé chez les infirmières utilisant l'eau de javel ou l'eau oxygénée ou l'une ou l'autre en association avec des aldéhydes (formaldéhyde, glutaraldéhyde)».
(1) Dumas O et al. Association of Occupational Exposure to Disinfectants With Incidence of Chronic Obstructive Pulmonary Disease Among US Female Nurses. JAMA Netw Open 2019;2(10):e1913563. doi:https://doi.org/10.1001/jamanetworkopen.2019.13563
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