Le congrès de l’ERS à Paris

Pollution et microbiome à l’honneur

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Publié le 04/10/2018
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Le congrès de la Société européenne de pneumologie (ERS, European Respiratory Society) s’est tenu cette année à Paris, du 15 au 19 septembre dernier. Une édition qui a connu un franc succès, puisqu’elle comptait près de 23 000 inscrits, représentant 137 pays. « Il s’agit vraiment d’un congrès à dimension mondiale », se félicite le Pr Anh Tuan Dinh-Xuan, qui le coprésidait avec le Pr Nicolas Roche, président de la Société de pneumologie de langue française (SPLF).

Une session en français

« L’ERS a pour habitude de solliciter des représentants de la ville organisatrice, et le travail mené en partenariat avec la SPLF a permis d’avoir une présence locale significative », souligne le Pr Dinh-Xuan. C’est la troisième fois – la première étant en 2016 au congrès de Londres – qu’une session en français a été proposée aux participants. Une belle initiative dans une réunion scientifique où la très grande majorité des communications se font en langue anglaise. Le programme de cette session francophone a été élaboré par le conseil scientifique de la SPLF. De telles sessions non anglophones sont également organisées avec la Chine, la Russie et les pays hispanophones.

Autre domaine où la France a été bien représentée : le championnat de médecine respiratoire. Quatre équipes de pneumologues de moins de 40 ans ont répondu à toute une série de questions à choix multiple. Portugal, France, Roumanie et Israël ont participé à ce championnat, et la France est arrivée en 2e position.

Huit grands domaines

Près de 4 500 abstracts ont été soumis, et plus de 480 sessions scientifiques se sont tenues au cours des cinq journées de congrès. La Société européenne de pneumologie avait identifié huit grands domaines autour desquels se sont articulées les communications : les maladies des bronches, les maladies interstitielles, les maladies vasculaires pulmonaires, l’oncologie thoracique, les maladies infectieuses (dont la tuberculose), les maladies respiratoires pédiatriques, les maladies respiratoires liées au sommeil, et les soins intensifs respiratoires. Dans chaque domaine, les sessions « état de l’art » ont été l’occasion de partager le meilleur des publications internationales récentes.

« Nous avons cette année mis en exergue deux grandes thématiques, rapporte le Pr Dinh-Xuan : d’une part l’impact délétère majeur de la pollution environnementale, qui à elle seule tue plus que toutes les autres maladies pulmonaires, et d’autre part le rôle du microbiome. »

Si l’on parle beaucoup des polluants extérieurs, et plus récemment des produits ménagers, il ne faut pas oublier le tabac, dont les méfaits sont bien connus, mais aussi la e-cigarette et le tabac chauffé. « L’utilisation de la cigarette électronique ne se justifie que dans le cadre d’un sevrage. Or, on assiste de plus en plus à un usage détourné, notamment par les plus jeunes, pour lesquels la e-cigarette est une porte d’entrée vers le tabagisme », regrette le Pr Dinh-Xuan.

Quant au microbiome, « il est désormais établi qu’il interagit avec le génome humain, ce qui conduit le système immunitaire à être plus efficace dans la reconnaissance des germes pathogènes et dans la défense de l’organisme », rappelle le pneumologue. L’altération du microbiote pulmonaire physiologique conduit à l’arrivée de nouveau germes, ce qui favorise non seulement la survenue de maladies infectieuses, mais aussi très probablement le développement de pathologies chroniques comme l’asthme, la bronchopneumopathie chronique obstructive ou encore la fibrose pulmonaire interstitielle. Ces trois pathologies sont caractérisées par des épisodes d’exacerbation, chacun faisant passer la maladie à un stade de sévérité supérieure. « Ces épisodes d’inflammation reflètent l’inadaptation de la réponse immunitaire qui découle de la modification du microbiote, explique le Pr Dinh-Xuan. Chaque individu a son propre microbiote pulmonaire, dont les évolutions dépendent des conditions locales comme la température ou la pression partielle en oxygène. » Par exemple, certains germes ayant besoin de moins d’oxygène se développent dans des terrains en hypoxie. L’un des défis pour les années futures est de mieux comprendre ces conditions particulières qui favorisent la chronicisation des maladies afin de proposer une prise en charge personnalisée.

Des actions pour le grand public

Parallèlement au congrès, deux journées de la mesure du souffle ont été proposées aux parisiens par la Fondation respiratoire européenne (European Lung Foundation) en coopération avec la Fondation du souffle et la Fédération française des associations et amicales de malades, insuffisants ou handicapés respiratoires (FFAAIR). Quelque 1 500 visiteurs se sont rendus sur le parvis de l’Hôtel de Ville, où plus de 1 000 mesures du souffle ont pu être réalisées. Le public a également été sensibilisé aux méfaits du tabac et de la pollution.

D’après un entretien avec le Pr Anh-Tuan Dinh-Xuan, président du congrès de l’ERS

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin: 9691