« Haut niveau »
Dans l’usage actuel, le terme Asperger désigne un « autisme de haut niveau ». Il s’agit individus relativement intelligents, qui s’impliquent peu dans les relations sociales et s’isolent dans des intérêts durables pour certaines sciences ou connaissances. Il peut s’agir par exemple d’enfants qui se passionnent très tôt pour la classification périodique des éléments de Mendeleïev, sans réaliser que cela est d’une utilité limitée pour la communication avec leurs pairs dans la cour de l’école. Ce diagnostic est plus souvent porté chez des garçons que des filles, et son usage a été popularisé par des œuvres de fiction où les personnages ayant des traits de type Asperger sont généralement représentés sous un éclairage sympathique. Outre le professeur Tournesol dans Tintin, on se souvient du film Rain Man où le héros, incarné par Dustin Hoffman, est un génie du calcul. Dans Millénium, la trilogie à succès de l’écrivain suédois Stieg Larsson, la détective free-lance Lisbeth Salander, une jeune femme sans vie sociale et sous tutelle, a des dons exceptionnels pour pénétrer dans toutes les bases de données informatiques.
Catégorie unique
Selon les propositions actuelles pour le DSM-V, publiées sur le site www.dsm5.org, l’autisme, le syndrome d’Asperger et les troubles envahissants du développement non spécifiés seraient regroupés dans une catégorie unique appelée spectre de l’autisme (autism spectrum disorder). Le spectre de l’autisme serait défini par :
1) un déficit de la communication et des interactions sociales (déficit de la communication verbale et non-verbale ; manque de réciprocité dans les interactions sociales ; pauvreté des relations avec les pairs) ;
2) des intérêts fixes et des comportements répétitifs (stéréotypies motrices ou verbales ; attachement excessif à des conduites routinières ou ritualisées ; centres d’intérêt limités et immuables). Les symptômes sont présents dès la petite enfance mais peuvent ne devenir gênants qu’à partir du moment où les exigences sociales deviennent plus complexes.
Plusieurs raisons sont invoquées pour regrouper dans le DSM-V le trouble autistique et le syndrome d’Asperger. La principale est que les deux affections appartiendraient à un même continuum, et ne représenterait que des degrés de sévérité différents. Il n’y aurait pas de frontières claires entre les cas « d’autisme léger » et ceux de syndrome d’Asperger. À son niveau le plus élevé, ce continuum se fondrait dans la normalité. Dans la conception actuelle (par exemple dans le DSM-IV), le syndrome d’Asperger se distingue du trouble autistique par l’absence de retard significatif du développement du langage et des capacités cognitives, notamment dans les trois premières années de la vie ; en revanche, il partage avec l’autisme les deux caractéristiques fondamentales que sont le déficit de la communication sociale et le désir de préserver un environnement et des intérêts immuables. Dans le DSM-V, les capacités verbales et cognitives ne seraient pas pertinentes pour un diagnostic différentiel et elles ne seraient que des caractéristiques cliniques notées séparément.
Eugen Bleuler
Comme le rappelle l’historien de la psychiatrie Edward Shorter, le terme « autisme » a été introduit par Eugen Bleuler en 1910 pour désigner la perte de contact avec la réalité et la prédominance d’une vie intérieure qui étaient selon l’auteur des caractéristiques fondamentales de la schizophrénie. L’autisme dans son sens courant d’autisme précoce infantile a été décrit plus tard, en 1943 dans la revue Nervous Child, par Leo Kanner, l’un des pères de la pédopsychiatrie américaine. Hans Asperger, un psychiatre viennois, a présenté indépendamment un syndrome voisin en 1944 dans la revue « Archiv für Psychiatrie und Nervenkrankheiten ». Ce n’est qu’en 1981 qu’une pédopsychiatre anglaise, Lorna Gladys Wing, décida de créer le « syndrome d’Asperger » pour rendre compte des difficultés d’enfants et d’adultes présentant des traits autistiques mais ayant un langage évolué et un certain niveau de vie sociale. Asperger avait en fait décrit autre chose que le syndrome qui porte son nom, et ses cas originaux correspondent en fait plus à des exemples de trouble autistique que de syndrome d’Asperger selon le DSM-IV.
Connotation péjorative
Le spectre des troubles autistiques, impliquant un continuum entre des formes mineures et sévères, et au-delà un continuum avec la normalité, a certainement une validité scientifique. Cependant, le mot autisme a acquis une connotation péjorative dans le langage courant et évoque pour le public un tableau clinique catastrophique. Les praticiens travaillant en France dans les centres de ressource pour l’autisme et les troubles apparentés (CRA) sont confrontés à l’effroi que produit ce terme chez les familles. Un article paru le 3 novembre 2009 dans le « New York Times » exprime les efforts déployés par les associations de patients Asperger pour conserver leur étiquette diagnostique et ne pas devoir endosser celle de « spectre de l’autisme ».
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