En psychiatrie, les traitements actuels peuvent améliorer significativement l’état de santé des patients soufrant de troubles graves et chroniques. Hélas, l’observance médicamenteuse et la participation des patients au suivi médicopsychologique sont souvent partielles. Plusieurs facteurs participent à cette situation : une conscience des troubles faible ou incomplète, des croyances erronées à l’égard des origines de la maladie et de l’action des traitements, des comorbidités avec d’autres troubles psychiatriques ou psychologiques, des difficultés de motivation dans l’intégration des multiples changements induits par la maladie dans le quotidien, etc. L’éducation thérapeutique du patient (ETP) répond à cette situation en favorisant une participation active du patient aux soins. Par l’intermédiaire de programmes individuels ou en groupe, le patient évolue dans ses représentations de la maladie et des traitements et développe des compétences lui permettant de mieux vivre avec la maladie, de mieux la gérer au quotidien.
La double notion d’éducation et de thérapie, contenue dans l’expression « éducation thérapeutique » définit un projet d’intervention à plusieurs facettes où chacune de ces deux dimensions interagit avec l’autre. Il s’agit à la fois de favoriser l’alliance thérapeutique et d’impliquer le patient dans sa prise en charge, mais également de réduire le risque de rechute et d’hospitalisation et de diminuer la symptomatologie. Pour chacun de ces objectifs, une part d’information et une part d’action thérapeutique sont parties prenantes. En outre, l’aspect pluridisciplinaire des programmes d’ETP modélise auprès du patient l’articulation des professionnels au sein de sa prise en charge, en lui permettant de mieux comprendre le rôle de chacun des intervenants et comment il peut les solliciter.
L’ETP en psychiatrie a la particularité de devoir prendre en compte les troubles psychologiques et psychiatriques dans la conduite des séances en s’y adaptant, mais également de contenir un aspect psychothérapeutique, visant à traiter certains troubles cognitifs défavorables à l’alliance et à l’éducation thérapeutique (des troubles mnésiques, par exemple).
Bénéfices cliniques
Les programmes d’ETP en psychiatrie ciblent surtout les personnes souffrant de troubles schizophréniques ou bipolaires. Ces actions s’attachent à favoriser chez les patients une conscience de leur trouble et une adhésion thérapeutique, une vigilance et une identification des manifestations symptomatiques, une hygiène de vie stable et de qualité et, bien souvent, une modification des comportements d’usage d’alcool ou de drogues. Ces programmes sont d’autant plus efficaces qu’ils sont introduits tôt dans l’histoire de la maladie du patient. Chez les patients souffrant d’un trouble schizophrénique, l’expérience du centre d’évaluation pour adolescents et jeunes adultes (C’JAAD) de l’hôpital Sainte-Anne à Paris, a montré qu’un groupe d’ETP permettait de réduire la symptomatologie, d’augmenter l’insight et l’alliance thérapeutique et de développer les compétences sociales. Ces travaux complètent les études précédentes soulignant le bénéfice de ce type d’intervention pour réduire le nombre d’hospitalisations et leur durée.
Dans les troubles bipolaires, la pratique de groupe semble avoir une efficacité plus grande pour prévenir les rechutes dépressives alors que les interventions individuelles sont plus indiquées dans la prévention des épisodes maniaques.
Au-delà de tous ces aspects, la force de ces interventions est de s’appuyer sur une approche collaborative de la relation soignant-soigné, dans laquelle s’articulent l’expérience du patient de sa maladie et l’expertise médicale, psychologique et sociale des équipes de soins. Un partenariat de soin qui modélise une nouvelle approche de l’action psychothérapeutique.
Psychologue, psychothérapeute, service hospitalo-universitaire, centre hospitalier Sainte-Anne (Paris)
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