Les données issues de registres de la « vraie vie » sont précieuses pour enrichir nos connaissances et guider notre pratique quotidienne, notamment pour les traitements de fond de maladies chroniques. L’observance thérapeutique et la qualité de réponse au traitement sont des paramètres essentiels pour diminuer le retentissement individuel et sociétal de ces maladies. Ce sont des données que ne peuvent fournir les essais contrôlés dans lesquels l’efficacité des médicaments est évaluée dans des populations soumises à des critères stricts d’inclusion et d’exclusion. En revanche, les patients traités en « vraie vie » constituent une population hétérogène avec un large spectre de comorbidités variées et de médicaments concomitants. Ainsi, seuls 20 à 30 % des patients recevant des anti-TNF en pratique quotidienne auraient été éligibles pour participer aux essais contrôlés ayant conduit à l'approbation de ces agents. Par ailleurs, l’observance thérapeutique est – classiquement et dans notre expérience quotidienne – souvent mauvaise au cours des spondyloarthrites, nuisant à l’obtention d’un résultat clinique optimal.
L’étude européenne collaborative EuroSpa
Dans deux publications récentes, une équipe danoise de Copenhague a regroupé les données de 12 registres européens (sans la France…), faisant partie de l’étude collaborative EuroSpa. Ces données ont été collectées de manière prospective dans les soins de routine chez des patients atteints de spondyloarthrite axiale (axSpa) (1) ou de rhumatisme psoriasique (PsA) (2).
Dans l’étude axSpa, un premier anti-TNF a été initié chez 24 195 patients et la réponse thérapeutique ainsi que le taux de rétention de l’anti-TNF ont été évalués à 6, 12 et 24 mois. À 6 mois, 27 % des patients avaient une maladie inactive selon le score ASDAS, tandis que 59 % avaient atteint un score BASDAI < 40. Une petite érosion de ces résultats était observée à 1 et 2 ans. L’observance était bonne : la rétention sur douze mois était de 80 % (IC à 95 % de 79 % à 80 %), allant de 71 % à 94 % selon les registres. La perte d’observance sur la 2e année était peu importante.
Dans la seconde étude, 14 261 patients atteints de PsA ont initié un premier anti-TNF. Le taux de rétention et l’activité du PsA ont été évalués. Environ la moitié des patients étaient en rémission DAS28 au bout de 6 mois et les trois quarts au bout d'un an. Le taux médian de rétention sur 12 mois (IC 95 %) était de 77 % (76, 78 %), variant de 68 à 90 % pour tous les registres.
Des différences de prescription et d’accès aux médicaments
Dans ces deux études, il a été constaté une forte hétérogénéité des caractéristiques de base et des résultats entre les différents registres nationaux. L’hétérogénéité des caractéristiques de base reflète les différences de modes de prescription et de disponibilité des médicaments en Europe, offrant ainsi des opportunités et des défis. La combinaison de registres a permis de comparer les schémas de prescription entre pays, ce qui n’est généralement pas possible. D'autre part, les différences d'accès au traitement et aux modes de prescription impliquent que les résultats obtenus par la mise en commun des données entre pays doivent être interprétés avec prudence. De futures études pourront évaluer l'impact de ces différences sur les taux de rétention et de réponse.
Il est aussi important de considérer la faisabilité d'une vaste base de données européenne des patients atteints de PsA ou axSpA traités en routine, avec des critères homogènes de phénotype, de suivi et d’évaluation. Elle offrirait des opportunités uniques de recherche avec des données de la pratique en « vraie vie ».
(1) rnbjerg LM et al. Ann Rheum Dis 2019 Nov;78(11):1536-44.
(2) Brahe CH et al. Rheumatology (Oxford). 2019 Oct 30. pii: kez427. doi: 10.1093/rheumatology/kez427. [Epub ahead of print]
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