La crise du Covid impacte toutes nos activités mais n’empêche pas la population de continuer de souffrir de ses maux habituels… Parmi eux, les sciatiques d’origine discale continuent de fleurir et les patients de solliciter nos avis et soins.
Un essai monocentrique conduit dans un centre orthopédique spécialisé de l’Ontario (Canada) a évalué cette question (1). L’étude a inclus, entre 2010 et 2016, 128 patients ayant une sciatique d’évolution chronique (4 à 12 mois) avec une hernie discale lombaire L4 – L5 ou L5 – S1. Les patients ont été affectés par tirage au sort (rapport 1:1) dans deux groupes de traitement : microdiscectomie ou six mois de soins médicaux standardisés suivis d'une intervention chirurgicale si nécessaire. Le critère de jugement principal était l'intensité de la douleur radiculaire à six mois sur une échelle visuelle analogique (EVA) de 0 à 10. Des critères secondaires étaient aussi mesurés : intensité de la lombalgie et de la radiculalgie, échelle d’incapacité d’Oswestry et scores de qualité de vie à six semaines, trois mois, six mois et un an.
Parmi les 64 patients opérés, le délai médian entre la randomisation et la chirurgie était de 3,1 semaines. Pour les patients non opérés, le traitement médical était standardisé et comportait : éducation des patients pour les gestes quotidiens, activité et exercice, utilisation d'antalgiques oraux et kinésithérapie active à la discrétion des praticiens. Des infiltrations épidurales cortisoniques (1 à 3) étaient aussi possibles.
Moins de douleur radiculaire avec la chirurgie
L’EVA douleur radiculaire initiale était de 7,7 à 8 sans différence entre les deux groupes. Lors de l’évaluation à six mois, elle était de 2,8 dans le groupe chirurgical et de 5,2 dans le groupe non chirurgical (différence moyenne ajustée 2,4 ; intervalle de confiance à 95 %, 1,4 à 3,4 ; P < 0,001). Les critères secondaires étaient également significatifs en faveur du groupe chirurgie. Sur les 64 patients du groupe non chirurgical, 22 (34 %) ont subi une intervention chirurgicale à une médiane de 11 mois après l'inclusion. Mais il faut aussi noter que 7 patients du groupe chirurgie n'ont pas été opérés en raison de la guérison spontanée des symptômes… ! Neuf patients ont eu des événements indésirables associés à la chirurgie et un patient a subi une chirurgie répétée pour une hernie discale récurrente.
Au-delà de 4 mois, opérer en cas de douleurs résistantes
Les hernies discales lombaires sont parmi les causes les plus fréquentes de sciatique avec une évolution le plus souvent autolimitée : guérison en trois mois chez 70 à 90 % des patients. La place du traitement chirurgical et le moment opportun de la mettre en œuvre restent l’objet de débats. La chirurgie n’a qu’un avantage modeste par rapport au traitement médical dans les trois premiers mois d’évolution d’une sciatique. D’un autre côté, la prolongation des symptômes au-delà de 6 à 12 mois est associée à un mauvais pronostic quant à l’évolution de la douleur radiculaire même après chirurgie… Cela est probablement le fait de douleurs de dénervation liées à la compression radiculaire prolongée. Même si l’étude de Bailey et al a des imperfections et biais, il est tout de même possible d’en tirer la conclusion pratique qu’une intervention chirurgicale est recommandée pour les patients ayant une hernie discale et une sciatique persistante de quatre mois ou plus en cas d’échec des mesures médicales.
Cependant, comme conclut l’éditorial (2) qui accompagne cet article, « l'essai n'aide pas les cliniciens à déterminer quels patients sont les plus susceptibles de bénéficier d'une intervention chirurgicale rapide ou quelle durée de soins médicaux est recommandée avant chirurgie ».
(1) Bailey CS et al. Surgery versus conservative care for persistent sciatica lasting 4 to 12 months. N Engl J Med 2020;382:1093-102
(2) Schoenfeld AJ, Kang, JD. Decision making for treatment of persistent sciatica. N Engl J Med 2020;382:1161-2
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