Le but du dépistage du cancer de la prostate, dont le traitement expose à des complications urinaires et sexuelles, est de diagnostiquer et in fine de ne traiter que les tumeurs évolutives, agressives, et non pas les tumeurs cliniquement non significatives.
Le dépistage individuel s’est jusqu’alors fondé sur le dosage du PSA et la réalisation par voie transrectale de biopsies systématisées échoguidées. Mais cette approche s’est heurtée à un double problème : le diagnostic fréquent de cancers de petit volume et de bas grade et, à l’inverse, la non-détection de tumeurs plus agressives, en particulier lorsqu’elles sont localisées dans les zones non prélevées par les biopsies standards, sans oublier les complications non négligeables, notamment infectieuses des biopsies.
Ceci a conduit à évaluer de nouvelles stratégies de dépistage, dont le recours à l’IRM multiparamétrique, en complément ou en remplacement des biopsies. L’IRM multiparamétrique associe des séquences morphologiques en T2 et des séquences fonctionnelles (diffusion et perfusion après injection de gadolinium). Elle présente l’avantage de visualiser l’ensemble de la glande et de mettre en évidence les foyers potentiellement agressifs.
Dans le cadre du diagnostic de cancer de la prostate, l’IRM a aujourd’hui une indication bien établie : la réalisation de biopsies ciblées après une première série de biopsies négative. Comme le soulignent les Drs Yann Neuzillet et Antoine Scherrer, l’IRM détecte mieux les tumeurs agressives de topographie atypique (antérieures, apicales ou basales) que ne le font les biopsies systématisées et évite un certain nombre de nouvelles biopsies en saturation plus agressives. Il est préférable dans cette indication d’attendre huit semaines pour réaliser l’IRM après la première série de biopsies pour éviter les difficultés d’interprétation induites par les saignements secondaires aux biopsies.
Toujours dans le cadre du diagnostic, l’IRM a également fait la preuve de son intérêt avant la première série de biopsies lorsqu’un cancer de la prostate est fortement suspecté. Dans cette indication émergente, pour laquelle le recul est moindre, l’IRM peut soit montrer un foyer agressif et donc permettre de faire des biopsies guidées avec fusion d’image (échographie et IRM), soit être négative, ce qui pourrait permettre de surseoir aux biopsies lorsque la cinétique du PSA n’est pas totalement probante.
« À terme, grâce à l’IRM, on aimerait arrêter de faire de l’échantillonnage systématique de la glande ; seuls les foyers significatifs agressifs, à forte cellularité, pourraient être biopsiés en multipliant les prélèvements sur la cible, les foyers non vus en imagerie de diffusion sur une IRM de bonne qualité étant petits et peu agressifs », indique le Dr Antoine Scherrer.
La réalisation d’une IRM avant la première série de biopsies permet en outre de réaliser plus précocement le bilan d’extension en cas de tumeurs agressives, en une seule et même séance.
Il faut bien sûr définir les critères faisant indiquer une IRM dans ce contexte, tels que la vitesse d’augmentation du PSA, l’âge ou l’espérance de vie. « L’IRM n’a pas vocation à remplacer l’examen clinique et ne doit pas être proposée à la place du dosage du PSA et du toucher rectal », insiste le Dr Neuzillet.
L’IRM est également évaluée aujourd’hui dans le cadre de la surveillance active par exemple chez des patients ayant peu de fragments positifs après biopsies, une tumeur peu agressive avec un Gleason ≤ 6. « Au lieu de répéter les biopsies, au prix de complications non négligeables, la réalisation d’IRM régulières pourrait permettre de faciliter la surveillance active si les données de la littérature confirment cette option », estime le Dr Scherrer.
Reste bien sûr le problème de l’accès à cette technique d’imagerie : le parc français d’IRM 3 teslas, hauteur de champ actuellement préférée pour la prostate (bien qu’il soit possible d’obtenir des examens d’excellente qualité avec un champ magnétique de 1,5 teslas), est insuffisant. Pour permettre à plus de patients de bénéficier d’une IRM il est souhaitable de réduire le temps d’examen, en le limitant à deux séquences (en contraste T2 et diffusion) sans injection de gadolinium. Certaines publications montrent que cela pourrait suffire sans altérer les performances de la technique.
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