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Cystites récidivantes, ne pas surmédicaliser

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Publié le 27/06/2025
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Face à une plainte de cystites aiguës récidivantes, la démarche diagnostique consiste avant tout à en rechercher la cause, ce qui permet dans bien des cas de ne pas surmédicaliser la prise en charge.

Le catalogue mictionnel permet de dépister untrouble de la miction sous-jacent

Le catalogue mictionnel permet de dépister untrouble de la miction sous-jacent
Crédit photo : Adobe Stock

Au-delà de la prise en charge thérapeutique à la phase aiguë, la première étape de la prise en charge d’une cystite consiste à rechercher le mécanisme, à l’origine de l’épisode infectieux. Car « la survenue d’une infection urinaire n’est qu’un symptôme d’un dysfonctionnement de l’arbre urinaire, souligne le Dr Maxime Vallée, chirurgien urologue au CHU de Poitiers et responsable du comité d’infectiologie de l’Association française d’urologie (AFU). Tout épisode doit donc conduire à rechercher soit un problème fonctionnel (dans la grande majorité des cas), soit un problème anatomique congénital ou acquis ».

Après avoir écarté l’éventuelle présence de fièvre (en faveur d’une infection du haut appareil urinaire), il faut s’attacher à rassurer la patiente et à comprendre son contexte de vie (antécédents, profession, facteurs de risque…).

L’interrogatoire doit faire préciser les symptômes et notamment le caractère aigu. Si les symptômes apparaissent de façon chronique et persistante, sans amélioration de la qualité de vie sous antibiotiques, il faut revoir le diagnostic.

De même, le symptôme principal d’une cystite étant la présence de brûlures urétrales per-mictionnelles, son absence doit faire douter du diagnostic. En revanche, ce symptôme n’est pas pathognomonique et peut être présent dans d’autres pathologies vésicales et associé à d’autres signes comme la pollakiurie, les urgenturies, la nycturie, les douleurs sus-pubiennes en fin de miction, la pyurie et l’hématurie. « Face à ces nombreux symptômes, un diagnostic de cystite récidivante bactérienne peut parfois être posé trop vite. Il faut bien s’assurer qu’il ne s’agit pas d’une hyperactivité vésicale ou d’un syndrome douloureux vésical chronique, par exemple… » précise le spécialiste.

L’importance du catalogue mictionnel

L’examen clinique est incontournable. La débitmétrie et la mesure du résidu post-mictionnel également, mais l’outil indispensable est le catalogue mictionnel. Il permet de dépister des troubles acquis de la miction, de proposer une reprogrammation mictionnelle et de faire de l’éducation thérapeutique (thérapie comportementale urinaire).

Le défaut de diurèse est régulièrement mis en évidence, notamment chez les femmes jeunes qui se « retiennent » faute d’accès à des sanitaires propres…

« Il n’existe pas dans la littérature de référentiel pour une définition du catalogue mictionnel normal, physiologique. Pour autant, l’expérience montre que l’on peut retenir les critères suivants : l’intervalle mictionnel ne doit pas être supérieur à 4 heures, la capacité vésicale fonctionnelle ne doit pas dépasser 400 ml et la diurèse totale sur 24 heures ne doit pas être inférieure à 1,5 l », ajoute le Dr Maxime Vallée.

Indications restreintes pour l’antibiothérapie

Les antibiotiques ont des indications restreintes. « Par exemple, si les explorations n’ont pas permis de mettre en évidence la cause, si la cause ne peut être traitée, ou en cas d’échec de la prise en charge. Une antibiothérapie prescrite à tort peut parfois augmenter le risque infectieux ou être la source d’autres pathologies vésicales comme l’hyperactivité vésicale ou le syndrome douloureux vésical chronique. »

La cystite n’est pas une pathologie grave et le traitement antibiotique n’a d’intérêt que pour réduire la durée des symptômes. Leur durée médiane est de trois jours et l’évolution naturelle de la cystite est la disparition complète des symptômes à dix jours.

« De plus, en cas de doute diagnostique, une stratégie attentiste est légitime sans risque majeur pour la patiente. En effet, le risque de pyélonéphrite aiguë secondaire à une cystite bactérienne non traitée est faible, inférieur à 3 % des cas et favorisé par d’autres facteurs de risque sous-jacents. »

La TCU, un traitement à part entière

Des conseils simples permettent de corriger les problèmes fonctionnels.

« La thérapie comportementale urinaire (TCU) doit être considérée comme un traitement à part entière. Les conseils sont personnalisés en fonction du catalogue mictionnel afin d’apprendre à la patiente à uriner de manière physiologique (ne pas attendre plus de 4 heures, volume mictionnel sur 24 heures d’1,5 l…). Les résultats préliminaires de l’étude Urica, menée à Poitiers, ont bien montré que plus de la moitié des patientes consultant pour « cystites récidivantes » avaient finalement un autre diagnostic. Et en cas de cause fonctionnelle, la TCU a permis une guérison complète et pérenne pour plus de 92 % des femmes » souligne l’urologue.

En ce qui concerne les autres alternatives, la cranberry peut être utile dans certaines situations. En revanche, le D-mannose n’a pas montré d’efficacité dans une récente étude contrôlée, randomisée, publiée dans le Jama. Enfin, des vaccins (ou plutôt une immunoprophylaxie active), disponibles en spray sublingual dans certains pays, semblent être une perspective intéressante et prometteuse.


Source : Le Quotidien du Médecin