« En médecine générale, nous écoutons des histoires toujours belles, mais souvent tristes. C’est à cet endroit que les arts du cirque peuvent jouer un rôle », explique Maddly Guillaume, médecin généraliste en Seine-Saint-Denis. Dès 2015, elle commence à organiser un programme pour inviter les patients atteints de troubles dépressifs, à plusieurs spectacles de cirque chaque année. En 2016, elle fonde l’association « J’ai mal partout – Cirque médical ». Un spectacle par mois est proposé aux patients. En ce mois de novembre, c’est au cirque Phénix à Paris que le public pourra se changer les idées.
« Le cirque est un rond de paradis dans un monde dur et dément », cette citation d’Annie Fratellini, première femme clown à avoir fondé son académie, représente l’essence même de cet art pour la Dr Maddly Guillaume. C’est en suivant les cours du soir de l’académie Fratellini que Maddly Guillaume a mis le pied dans cet univers à 22 ans. Elle avait toujours eu « une attraction magnétique pour les arts du cirque. En découvrant cet univers, j’ai réalisé qu’il était possible de le partager avec les patients grâce aux représentations ». C’est ainsi que l’idée d’utiliser les arts du cirque dans sa thèse lui est apparue comme une évidence. Tout comme se concentrer sur les patients atteints de dépression. « Les patients, souvent atteints de multiples pathologies, peuvent développer des troubles dépressifs », rappelle la médecin.
Selon l’OMS, elle affecte environ 280 millions de personnes (chiffres 2023), et touche, en 2024, 14,3 % de la population française, tous âges confondus, selon Santé publique France. L’association « J’ai mal partout – Cirque médical » a pour mission de défendre les droits culturels et promouvoir l’accès aux arts du cirque pour les personnes fragilisées, en situation de dépression.

La médecine et le cirque, un tandem gagnant
La thèse de cette jeune praticienne de 36 ans montre des résultats prometteurs, avec des améliorations sensorielles, cognitives et émotionnelles. « Il existe une composante sociale essentielle qui permet de rompre l’exclusion, et de recréer du lien social à travers le spectacle vivant. Les arts du cirque engagent des éléments cognitifs bénéfiques, liés à la joie, aux exploits, et à l’acquisition du collectif. Ils apportent une dynamique optimiste précieuse », souligne la Dr Guillaume.
En 2022, l’association décide d’aller plus loin en créant un spectacle de cirque, Circo Infinito, conçu aussi bien pour les théâtres que pour les espaces médicaux à partir des éléments mis en avant dans sa thèse : « Culture et santé avec les arts du cirque » . « L’idée était d’apporter l’univers du cirque dans les lieux de santé, pour rassembler patients, soignants et proches », explique-t-elle.
La généraliste insiste sur l’importance de cette dynamique : « Cela permet d’insuffler au public une virtuosité optimiste. » Elle met également en lumière le rôle du clown : « C’est l’outsider qui part perdant mais finit par réussir quelque chose d’incroyable. Il incarne un signal d’autonomisation, de résilience et de persévérance. »
Pour ce spectacle, une série de dispositifs ont été mis en place pour permettre à chacun d’en profiter. « Ce projet a nécessité un énorme travail logistique, et impliqué des ingénieurs du son et une réflexion approfondie sur l’écriture du spectacle, afin de le rendre accessible à tous. » Le spectacle, qui a également été joué aux États-Unis, est accessible même aux personnes souffrant d’altérations auditives ou visuelles sans pour autant mettre de côté la qualité, « l’exigence artistique est primordiale », reprend l’omnipraticienne.
La troupe s’appuie sur trois éléments majeurs dans l’écriture scénique : en premier lieu la virtuosité optimiste, illustrée par le jonglage, la sangle aérienne, l’acrobatie et la danse aérienne, en second lieu la musique interprétée en direct. L’envol constitue le troisième pilier du spectacle. « L’aérien est très important : il demande beaucoup de réflexion et d’ingénierie, tout en donnant une matérialité à la capacité d’évasion de chacun », conclut Maddly. « J’ai mal partout – Cirque médical » se produira le 22 décembre pour les enfants de l’hôpital la Pitié Salpêtrière, au théâtre Sylvia Monfort à Paris. Une grande victoire pour la praticienne qui n’est pas prête de tomber du fil.
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