Il manque une cinquantaine de sièges à Ensemble pour obtenir une majorité absolue. La médiocrité de son score, le départ de certains ministres non-élus, le fait que les extrêmes de droite et de gauche ont fait les meilleurs résultats ne contraignent d'aucune manière le président à démissionner ou à passer la main. Ce n'aurait pas été un problème si Jean-Luc Mélenchon, fort de son résultat, avait été un socialiste classique ou si Marine Le Pen avait appartenu à la droite classique. On ne sait pas encore si, dans les "divers", il y a de quoi convaincre assez de députés pour rallier la macronie, on n'ignore pas que Christian Jacob a fermé toute ouverture en direction de Macron, mais il y a le règlement de comptes et il y a les responsabilités d'un parti.
LR n'est pas le mieux loti. C'est une formation qui, à 61 sièges, a sauvé l'essentiel mais a quand même laissé partir beaucoup de gens vers l'extrême droite. Le séisme est d'une telle puissance qu'il a cassé un mode de scrutin (uninominal, majoritaire à deux tours) qui favorise les grandes formations politiques. On peut dire aujourd'hui qu'il a fonctionné comme la proportionnelle et qu'il a satisfait les revendications mille fois exprimées par la Nupes et par le RN. La réforme des institutions tant réclamée et tellement ajournée est-elle vraiment utile ? Une chose est sûre : la proportionnelle aurait encore aggravé la friabilité du corps électoral et élu une Assemblée patchwork qui aurait rendu la France encore plus ingouvernable.
C'est le rôle du président de la République de rappeler aux élus sous quelle égide institutionnelle ils travaillent. Ce n'est pas parce que trois oppositions irréconciliables sont apparues que le chef de l'État a perdu quelques-uns de ses droits et pouvoirs, au contraire. Il est là pour rappeler qu'il a été élu pour gouverner, que tout ostracisme à son égard n'est pas républicain et que, si la critique est acceptable, le combat au finish contre un président élu ne l'est pas. C'est lui qui dispose de l'arme la plus lourde au cas où le Parlement devient une volière : la dissolution et de nouvelles législatives suceptibles de lui accorder la majorité absolue qu'il n'a pas conquise ce mois-ci.
Mélenchon n'est pas un militant socialiste allemand
Mais avant d'en arriver là, il n'est pas impossible que Macron trouve quelques interlocuteurs raisonnables qui admettent que la Constitution prévoit moins son départ qu'une représentation un peu favorable au président. Tout le monde nous explique que ce ne serait pas un malheur si nous faisions comme les Allemands en créant des coalitions. Non seulement les deux systèmes ne se ressemblent pas, mais qui croit sincèrement que M. Mélenchon puisse être comparable à un militant du SPD allemand ? Quand à Mme Le Pen, elle peut donner des leçons à toutes les extrêmes droites d'Europe, elle ne risque pas d'entrer un jour à l'Èlysée : entre la Nupes qui se divisera face au premier projet de loi et le RN qui veut dire son fait à l'Europe et à l'euro, on peut estimer que les nouvelles lignes de fragmentation de l'Assemblée ne sont guères propices à une coalition.
Au moment où triomphent, malheureusement, les extrêmes, rien ne serait pire que les solutions extrêmes, coalition empoisonnée ou dissolution. La vérité est que, au delà du choc causé par l'ascension de Mélenchon et de Le Pen, celui qui a toutes les cartes, c'est encore Macron. C'est une position de force, malgré tout ce qu'en dit la presse : il peut (déjà !) changer de Première ministre ; il peut démissionner, ce qui, croyez-moi, ne serait pas très civique mais aurait le don d'éteindre tous les incendies factices allumés par des aventuriers de la politique ; il peut dissoudre l'Assemblée ; il peut faire une offre à des âmes tendres et fragiles,incapables de résister.
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