Nommé par Vladimir Poutine pour reprendre en mains une campagne jalonnée d'échecs, le général Serguei Sourovikine est un dur. Il a ordonné l'évacuation des Russes de Kherson, mais auparavant, il a fait bombarder le territoire ukrainien de façon massive, privant les habitants d'eau et d'électricité. Il n'a pas pour autant atteint leur moral. Ils ont fêté avec la joie du vainqueur la libération de Kherson. Elle n'était pas acquise et on pouvait craindre qu'elle n'engendrât un bain de sang. Le général Sourovikine est peut-être féroce, il est aussi réaliste.
Bien sûr, ni Poutine ni ses généraux n'ont décidé de faire un cadeau à Volodymyr Zelensky. Ils n'ont reculé que pour mieux sauter. Ce qui permet à nombre d'analystes de relativiser la victoire de Kherson. Mais les événements militaires ne suffisent pas à décrire l'évolution de cette guerre. Même si le nombre de soldats mis hors de combat est le même pour l'Ukraine que pour la Russie, le contexte politique est différent. La motivation des Russes est à peu près nulle alors que les Ukrainiens, sous l'effet du patriotisme, ont un moral d'acier ; la Russie est en train d'acquérir une réputation de plus en plus mauvaise, y compris chez ses alliés traditionnels, par exemple l'Inde et la Chine, qui ne se privent plus de critiquer une guerre inutile et dévastatrice : aussi stratège que puisse l'être le général Sourovikine, il a mal commencé : impitoyable pour les civils ukrainiens, il ne saurait mettre à son actif la chute de Kherson.
Le mal est fait
Même s'il faut s'attendre à la reprise de combats féroces, pour Poutine, le mal est fait. Il sait que ses concitoyens se posent des questions sur l'utilité et la gestion de la guerre ; il sait qu'il est de plus en plus isolé, dès lors que la Chine et l'Inde lui reprochent de s'être attaqué aux frontières d'un État indépendant. Et c'est pourquoi il a préféré ne pas se rendre au rassemblement international du G20, bien que l'Indonésie l'ait invité. La pression internationale est maximale pour que Poutine arrête la guerre. Mais personne n'est capable de dire comment Poutine le dictateur et Zelensky le résistant pourraient négocier un accord de paix. Sans doute est-il trop tôt et rien n'empêche les observateurs de se demander si les Ukrainiens ont la capacité ou non de reprendre la Crimée tout entière.
Au début de la guerre, le 24 février dernier, on avait assisté à une division des réactions dans le monde, les pour et les contre, le retour du non-alignement, et la tentation de la Chine, de l'Inde et du Brésil de soutenir le maître du Kremlin. Ce n'est plus le cas aujourd'hui car on ne peut pas logiquement combattre le colonialisme et applaudir une conquête coloniale de type XIXè siècle. Et puis, la cruauté de Poutine, les exécutions sommaires, les bombardements ciblant les civils, les crimes de guerre et contre l'humanité appelaient une réprobation mondiale à laquelle les attardés du non-alignement devaient adhérer. Cependant, si la guerre s'est retournée contre celui qui l'a lancée, lui n'a pas changé et la nomination de Sourovikine ne laisse présager rien de bon, pour l'Ukraine, mais aussi et surtout pour la Russie.
Ce n'est pas parce qu'un conflit atroce n'a donné au Kremlin aucun résultat probant, que plus d'atrocités régleront le conflit au profit de Poutine. Il s'est de lui-même enfermé dans la nasse, aveugle aux conséquences très négatives d'un comportement directement inspiré de l'hitlérisme. Il ne sait que faire la guerre, mais les Ukrainiens ont encore la force de se battre. C'est pourquoi la négociation est improbable. Ou bien Poutine écrase l'Ukraine dans un bain de sang, ce qu'il n'a sans doute plus les moyens de faire ; ou bien il perd la guerre et ses fonctions.
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