L’implication de la population dans les programmes de dépistage organisé (DO) des cancers reste en deçà des ambitions européennes visant des taux de participation à 45 % pour le cancer colorectal, 70 % pour le sein et 80 % pour le col de l’utérus. En France, ces taux plafonnent à 24 %, 47,7 % et 59 %, respectivement, a déploré la Dr Catherine Grenier, responsable des usagers de la Caisse nationale d’Assurance-maladie (Cnam), lors d’une plénière.
L’appel aux généralistes
Au cours de cette session, tous les intervenants ont souligné l’indispensable engagement attendu des généralistes pour booster la participation des populations cibles. L’objectif porté par l’Institut national du cancer (Inca) d’augmenter d’un million d’ici 2025 le nombre de dépistages annuels sera « compliqué » à atteindre sans leur investissement, a suggéré Frédéric de Bels, responsable du département prévention de l’Inca.
Pour les trois cancers couverts par le DO, la détection précoce de la maladie se traduit par des traitements « moins lourds », « moins de séquelles », une baisse de la mortalité globale et une « augmentation de la durée de vie », plaide-t-il. Un message que les généralistes sont invités à transmettre à leurs patients.
Sur les craintes de surdiagnostic et de surtraitement, concernant le cancer du col de l’utérus (DOCCU), il peut être utile de rappeler que le dépistage a « démontré son efficacité », malgré le surdiagnostic, souligne Frédéric de Bels. Dans le cancer du sein, parmi les tumeurs dépistées, « 85 % sont invasives » et le surdiagnostic est estimé à 3 %, ce qui reste « mineur » poursuit-il. En comparaison, dans le cancer de la prostate - pour lequel aucun DO n’est en place - le surdiagnostic serait de 60 %. « Les hommes y participent pourtant », ironise Frédéric de Bels.
Des dispositifs en mutation
Pour accompagner les efforts des généralistes, plusieurs évolutions du DO ont été introduites. En janvier, l’envoi des invitations et des relances a fait l’objet d’une « reprise en main » par la Cnam, au détriment des centres régionaux de dépistage des cancers (CRCDC). Dans un rapport, l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) pointait d’importantes variations territoriales, justifiant un pilotage national, explique Frédéric de Bels.
Forte de l’expérience du Covid, l’Assurance-maladie a créé sept plateaux d’appels téléphoniques pour relancer les populations les plus éloignées des soins. Les discours « motivants » des appelants sont efficaces pour gagner « quelques points » de participation, assure la Dr Grenier. Le recul manque encore pour évaluer l’effet de cet « aller vers » individuel, mais les premiers retours sont « prometteurs ».
La Cnam met également à disposition de chaque médecin traitant des informations sur ses patients éligibles non dépistés. Actuellement en version imprimée, ces listes devraient bientôt être diffusées en format numérique.
D’autres évolutions portent sur l’accès aux tests. Dans le DOCCR, les modalités d’obtention du kit de dépistage ont été diversifiées : en plus de la voie classique par envoi postal et par les médecins traitants, ils sont disponibles directement, sous conditions d’éligibilité, en ligne et en pharmacie. Dans le DO du cancer du sein (DOCS), des démarches d’« aller vers » collectif se déploient pour atteindre les populations éloignées des soins via par exemple des bus de dépistage.
Pour le DOCCU, l’option de l’autoprélèvement est sur la table. Après une recommandation de la HAS et un guide de l’Inca sur le sujet, la Cnam planche sur un remboursement.
Côté technique, des évolutions sont attendues dans le DOCS. La 2e lecture, actuellement effectuée par les CRCDC, pourrait revenir aux centres d’imagerie. À terme, une IA pourrait même s’en charger, une première étude favorable ayant été publiée en 2023. L’arrivée de la tomosynthèse (mammographie 3D) interviendra certainement avant. Des travaux restent nécessaires pour valider certains aspects, mais la technique est recommandée par la HAS.
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