La pseudopolyarthrite rhizomélique est classiquement traitée par de faibles doses de cortisone, idéalement pendant un an. « La dose initiale est de 15 mg/j, diminuée progressivement, mais au bout d’un an, il faut généralement continuer le traitement qui peut durer deux à quatre ans dans la majorité des cas, ce qui fait au total beaucoup de cortisone avec des évènements indésirables fréquents », explique le Pr Alain Saraux (CHU de Brest) coordinateur de l’étude Bachelor. Or « il n’y a que très peu d’études portant sur un traitement alternatif dans la PPR débutante. Le méthotrexate n’a pas montré une bonne efficacité et les anti-IL6 (tocilizumab, sarilumab) ont montré une efficacité dans la PPR corticodépendante. Aucune étude probante n’a été conduite sans cortisone »
L’année dernière, « nous avions montré les résultats d’une étude menée chez des patients atteints de PPR débutante traités par abatacept sans cortisone, mais la maladie n’était contrôlée que pour 50 % des patients », poursuit le spécialiste. La méthodologie proposée apparaissait néanmoins efficiente pour tester d’autres molécules qui pourraient être efficaces sans corticoïdes et sans perte de chance pour le patient.
C’est ainsi qu’une nouvelle étude randomisée, contrôlée versus placebo a été conduite afin d’évaluer si le baricitinib (inhibiteur de JAK 1/2) pouvait permettre un contrôle de la PPR débutante, naïve de traitement, sans glucocorticoïdes par voie orale. 34 patients ont été randomisés (22 femmes et 12 hommes). L’âge moyen était de 69,1 (+/- 7,2) ans. La durée moyenne d’évolution depuis le premier symptôme était de 60,7 (+ /- 46,9) jours. Le score d’activité DAS PPR CRP moyen était de 31,7 (+/- 10,5).
Les patients ont d’abord reçu 4 mg de baricitinib par voie orale (n=18) ou un placebo (n=16) (avec un sauvetage des glucocorticoïdes par voie orale possible en cas d’activité élevée de la maladie) pendant 12 semaines, puis 2 mg de baricitinib ou un placebo jusqu’à la semaine 24. Une infiltration subdeltoïdienne de glucocorticoïdes était autorisée à la semaine 0 et à la semaine 4.
Un effet rapide
Le critère d’évaluation principal était le DAS-PPR CRP < 10, sans sauvetage par glucocorticoïdes par voie orale de la semaine 0 à la semaine 12. La période de suivi était de 36 semaines.
Comparativement au placebo, la dose de 4 mg de baricitinib a permis d’obtenir un DAS-PPR CRP comparable à la semaine 12 avec moins de participants nécessitant un sauvetage par glucocorticoïde par voie orale.
« L’effet est spectaculaire à la semaine 12 : près de 80 % des patients sous baricitinib étaient guéris et ne présentaient pas d’activité de la maladie versus 13 % dans le groupe placebo. Et cela se maintenait à 24 semaines avec 2 mg de baricitinib et à 36 semaines. Aujourd’hui, nous avons un recul de plus de 18 mois et aucun patient n’a eu besoin d’être retraité », détaille le Pr Alain Saraux. Le baricitinib pourrait ainsi être un traitement curatif chez des patients PPR naïfs de tout traitement. « Cela pourrait révolutionner la prise en charge de la maladie, notamment en cas de contre-indications relatives aux glucocorticoïdes (ostéoporose, diabète, troubles psychiques, hypertension…) »
Aucun décès, aucun évènement cardiovasculaire indésirable majeur ou nouveau signal de tolérance n’a été observé.
« Pour confirmer ces résultats, nous allons lancer une étude de plus grande envergure début 2025 avec trois groupes de patients (baricitinib 4 mg, baricitinib 2 mg et placebo). Nous espérons montrer qu’une dose de 2 mg est suffisante. Par ailleurs, cette étude ouvre la porte à d’autres essais sans corticoïdes associés, avec des anti-IL6, anti-IL17 ou d’autres inhibiteurs de JAK… », conclut le Pr Alain Saraux.
Cela pourrait révolutionner la prise en charge de la maladie
Pr Alain Saraux (Brest)
D’après un entretien avec le Pr Alain Saraux (CHU de Brest)
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