Alors que le gouvernement veut mettre l’accent sur la prévention et la lutte contre la maltraitance infantile, une session du congrès était consacrée aux fractures qui doivent donner l’alerte. Comme l’a rappelé le Pr Agnès Linglart (hôpital du Kremlin Bicêtre), les fractures du nourrisson sont dans deux tiers des cas non accidentelles, donc le fait d’une maltraitance ou d’une négligence et assujetties d’un risque de récidive.
Il faut y penser lorsque l’histoire est discordante, en l’absence de témoins ou avec un scénario peu compatible avec l’âge du patient. Il faut examiner l’enfant déshabillé entièrement pour rechercher d’éventuelles ecchymoses ou des brûlures, sans oublier de regarder les muqueuses et les tympans.
Au moindre doute, une radio du squelette entier permet de traquer des fractures multiples, avec des anciennetés éventuellement différentes. « Dans trois quarts des fractures non accidentelles, il y a au moins deux fractures », affirme le Dr Solène Loschi (Hôpital Trousseau, Paris). Il faut bien regarder les zones métaphysaires dont l’aspect “en anse de seau” est évocateur. Les lésions métaphysaires sont possibles en cas de traumatismes obstétricaux, mais il faut pouvoir rattacher la chronologie à l’accouchement.
Une fracture du fémur chez un enfant qui ne marche pas est très suspecte. Idem pour celles des côtes, qui sont dues dans trois quart des cas à une compression traumatique thoraco-vertébrale par des mains enserrant le torse de l’enfant.
Pas de signalement abusif
Quant aux fractures du crâne, si elles sont accidentelles dans deux tiers des cas, elles doivent attirer l’attention si elles sont multiples et diastasiques (perte de substance). Aucune fracture du crâne n’est spécifique. Un scanner peut être utile si l’on suspecte un traumatisme crânien dans le cadre du bébé secoué. La scintigraphie peut être intéressante en cas de décollement périosté sur un os long. Il faut éliminer les diagnostics différentiels que sont le rachitisme, l’ostéopathie du prématuré, l’ostéogenèse imparfaite et le scorbut. Le bilan phosphocalcique permet d’y voir plus clair, mais il doit s’intégrer à un bilan radiographique. « Il est important de reconstituer l’historique », complète le Dr Anya Rothenbuhler (hôpital de Bicêtre), par exemple si l’on pense à une carence maternelle en vitamine D.
En cas de suspicion de maltraitance, « le signalement est un soin à part entière. Il n’y a pas de signalement abusif et celui-ci n’engage pas de responsabilité civile, pénale ni disciplinaire. Son absence peut par contre consistuer une non-assistance à personne en danger », avertit le Dr Linglart.
De fait, « la maltraitance est la quatrième cause de décès avant 4 ans », souligne la pédiatre. Récemment, le BEH soulignait par ailleurs les effets à long terme de la maltraitance infantile et appelait à mettre en place « une méthode d'identification précoce des enfants concernés, si possible dès les premiers mois de vie ». À ce titre, « toute lésion traumatique chez un enfant de moins d’un an devrait donner lieu à une suspicion de maltraitance jusqu’à preuve du contraire », estimaient les auteurs.
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