Élu samedi à la tête de MG France, le Dr Jacques Battistoni, 60 ans, dévoile au « Quotidien » ses priorités. Le généraliste normand souhaite revaloriser toutes les visites à domicile des patients dépendants, vise 30 % de la rémunération sous forme de ROSP et de forfaits et ne veut surtout pas que les généralistes soient oubliés des « négos » télémédecine.
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN : Les généralistes ont obtenu le 1er mai que la consultation de base soit portée à 25 euros. Y a-t-il d'autres combats tarifaires à mener ?
Dr JACQUES BATTISTONI : Oui, il y en a encore ! Le premier est celui de la visite à domicile. Les généralistes en font beaucoup moins qu’avant ; or, si on souhaite qu'ils continuent, ce qui est indispensable pour la population et le maintien à domicile des personnes âgées, il est important de valoriser cette visite. C'est pourquoi nous demandons un élargissement de l'application de la visite longue (VL), introduite depuis le 1er novembre dans les actes très complexes pour les patients atteints de maladies neurodégénératives et facturée 70 euros (dont 10 euros de déplacement). Toutes les visites aux patients dépendants doivent être honorées comme celles à des patients atteints de troubles cognitifs. C’est une revendication prioritaire, réaffirmée en assemblée générale.
Bien sûr, il ne faudra pas qu'en parallèle la valeur de notre acte de base s’effrite. Ce serait un signal négatif pour les médecins. Ce tarif, qui sera celui de l’activité en demande de soins non programmés, devra s’adapter au coût de la vie et de la pratique.
Avez-vous déjà des revendications sur la ROSP ou les forfaits ?
Un de nos objectifs est d’avoir une part plus importante de ROSP [rémunération sur objectifs de santé publique] et de forfaits dans la rémunération en passant de 15 % actuellement à 30 %.
Mais pour le moment, nous sommes surtout vigilants sur l’application du forfait structure et de la ROSP, dont c'est la période de déclaration des indicateurs. Par exemple, l'une des conditions pour bénéficier du forfait structure est d'avoir un dossier médical partagé ; mais un certain nombre d'éditeurs de logiciels considèrent qu’il faut payer des applications pour y accéder. Pourtant, la caisse a assuré qu’il suffisait de se connecter une fois sur l’espace de confiance du DMP pour accéder à cet item…
Nous regarderons aussi de près la mise en place du « forfait patientèle médecin traitant » début 2018. Il y a un travail de pédagogie nécessaire auprès des médecins, notamment pour qu'ils fassent la déclaration.
La négociation sur la tarification de la télémédecine s’ouvrira dès janvier avec la CNAM. Comment l’abordez-vous ?
Avec une idée simple : la télémédecine, et notamment la télé expertise, ne doit pas rémunérer que le médecin expert, mais aussi le médecin requérant ! Le travail de recueil des éléments d’appréciation est aussi important que le travail d’expertise du médecin qui donne un avis. Nous irons à la négociation en demandant une rémunération équilibrée entre le médecin requérant et le praticien expert. La télémédecine n’est pas seulement pour le spécialiste, mais doit aussi s’appliquer au généraliste.
Je n’ai pas de revendication particulière quant au montant de cet acte, j’espère que nous partirons des tarifs existants pour la télémédecine en EHPAD [qui sont ceux d’une consultation classique à 25 euros avec d’éventuelles majorations, NDLR].
La question des déserts médicaux revient sur le devant de la scène. Que proposez-vous ?
Il faut répondre collectivement aux demandes de soins non programmées sur un territoire. Cela nécessite des moyens, c’est-à-dire un secrétariat, avec une plage de consultations dédiée aux demandes de soins non programmés, et une coordination accrue. Des formes diverses sont possibles : une maison médicale de garde ouverte la journée, l’ouverture d’une consultation dans une maison de santé, etc.
Il faudra aussi apporter des ressources aux généralistes pour suivre les malades chroniques. L’infirmière de pratique avancée – le modèle ASALEE – qui travaille en partenariat avec le généraliste nous paraît pertinent. Tous les médecins qui souhaitent travailler avec une de ces infirmières doivent pouvoir le faire : il faut donc en augmenter le nombre, en former davantage, développer leurs missions. Au début, c'était de l'éducation thérapeutique au diabète ou au risque cardio-vasculaire. Cela peut s'étendre à d'autres domaines, comme des tests pour repérer les troubles cognitifs chez les personnes âgées, une spirométrie chez les patients fumeurs…
Vous entamez un Tour de France des généralistes…
Oui, nous allons le débuter dès le début 2018. Notre tâche est d’aller prendre le pouls des régions et des départements afin de constater quels sont leurs problèmes en termes de démographie ou de relations avec les agences régionales de santé. Nous voulons voir aussi quelles sont les réalisations sur le terrain car il n’y a pas de modèle unique d’organisation des soins. À partir de ces expériences, nous ferons remonter des idées et des propositions.
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