La France se prépare à passer à la phase épidémique du coronavirus. Vendredi, la France était toujours au stade 2, dont le but est d'endiguer la propagation du virus. La phase 3 signifie que le coronavirus circule activement sur tout le territoire, et qu'il est impossible de remonter les chaînes de contamination. Une « stratégie d'atténuation » est alors mise en place, explique le ministère de la Santé dans son guide de préparation au risque épidémique, inspiré du plan national « Pandémie grippale » de 2011.
La phase 3 se caractérise par une réorganisation du système de soins, qui consiste à réserver l'hôpital aux cas les plus graves. En particulier, le dispositif de maintien à domicile « vise à ne pas saturer les capacités d'hospitalisation des établissements de santé », selon le guide méthodologique sur le Covid-19. Les établissements médico-sociaux protègent les populations les plus fragiles, la médecine de ville étant placée en première ligne pour tous les patients sans gravité (environ 80 % des cas).
« Tout le système sera sous tension, l'hôpital mais aussi la médecine de ville, les EHPAD, et donc il faudra trouver pendant plusieurs semaines, avec beaucoup de résilience, des modes de fonctionnement pour passer cette épidémie », a résumé Emmanuel Macron vendredi.
Des contraintes sur les transports en commun, les rassemblements culturels, sportifs ou les écoles sont possibles, même si les mesures seront prises au cas par cas et de façon progressive.
Hôpitaux, SAMU, SMUR, internes et enseignants s'organisent
Dans la phase 3, tous les établissements sanitaires – et non plus uniquement ceux habilités pour Covid-19 – doivent pouvoir repérer, diagnostiquer, prendre en charge et mettre en œuvre des mesures d'isolement des patients contaminés. Les hôpitaux recensent, dans chacun des services, les hospitalisations et opérations non urgentes pouvant être différées. Ils définissent les limites de leurs capacités (lits, chambres isolées en soins intensifs et réanimation, matériel, équipements de protection).
Les établissements ayant un SAMU-Centre 15 vérifient et adaptent le dispositif prévu pour répondre à une augmentation de 200 % (triplement) des appels. Chacun des SAMU doit se doter d'un référent médical de crise pour assurer la permanence du contact avec le SAMU, l’ARS, la médecine de ville et les établissements de santé.
Les équipes SMUR sont déployées par le SAMU-Centre 15 pour la prise en charge à domicile des patients présentant des signes de gravité – initialement ou après une période de retour à domicile – et nécessitant une prise en charge hospitalière spécialisée, notamment en réanimation. « Quand on passera en phase 3, on ne fera plus de prélèvement de façon systématique, on réservera ça aux patients à risque, ayant des pathologies associées, ou aux professionnels de santé, explique au « Quotidien » le Dr Éric Lecarpentier, chef du SAMU 94 à l'hôpital Henri-Mondor (AP-HP). Peut-être qu’il faudra encore augmenter notre personnel, nous basons notre réaction sur l’adaptation au flux. Les secrétaires du SAMU commencent à se former à l’outil de régulation pour venir nous aider, afin de concentrer les assistants de régulation sur les appels du centre 15. »
Reste à savoir si le système hospitalier « fatigué depuis plusieurs mois, est prêt à encaisser ce choc que va être un certain nombre de malades graves », fait remarquer le Pr Delfraissy. « Certains cliniciens ont évoqué des difficultés pour récupérer certains matériels et motiver les équipes », surtout « si on s'inscrit dans la durée ».
Plusieurs hôpitaux ont déjà sollicité l'aide d'internes pour prêter main-forte aux services et Centre 15 sur la base du volontariat. Le président de la conférence des doyens, le Pr Patrice Diot, a demandé ce vendredi aux équipes enseignantes des facultés d'« alléger leurs charges universitaires » afin qu'ils participent aux « efforts supplémentaires demandés ».
Médecins, infirmières et kinés libéraux davantage sollicités
En cas de passage au stade 3, la démarche visera « dans un premier temps » à développer une filière ambulatoire « robuste » facilitant le retour précoce et le maintien à domicile des patients Covid-19 confirmés.
Dans un second temps, la prise en charge des patients sans critère d’hospitalisation serait réalisée systématiquement en ambulatoire (seuls les patients avec des signes graves seraient pris en charge en établissement). D'où l'expression souvent reprise de professionnels de santé libéraux « en première ligne ». Cette prise en charge pourra se faire « en lien » avec un service d’hospitalisation ou de soins à domicile. Les soins dispensés par les infirmiers et kinés libéraux auprès des patients maintenus à domicile devront se renforcer, en complément de la prise en charge médicale.
Enfin, le maillage territorial des officines doit permettre aux pharmaciens d’exercer « leur mission de conseil et de dispensation des produits de santé ». « Une organisation sera définie en lien avec les professionnels de santé concernés afin de répondre à cet enjeu », indique le ministère.
EHPAD : personnes fragiles « priorisés »
Dans les établissements d'hébergement pour les personnes âgées (EHPAD), la phase 2 impose déjà la mise en place de gestes « barrières » (filtrage des visiteurs, port du masque, lavage des mains, confinement des malades, éviter les contacts non indispensables). En cas de contamination, les personnes âgées sont transférées dans un établissement de première ou seconde ligne. Si le gouvernement s'inspire du plan « Pandémie grippale » les restrictions de visites en EHPAD s'appliqueront.
En visite ce vendredi dans un EHPAD parisien, Emmanuel Macron est venu « réaffirmer son soutien au personnel des EHPAD, hôpitaux et maisons de santé ». Il a indiqué qu'à l'entrée en vigueur de la phase 3, les publics les plus fragiles seraient « priorisés », en particulier les personnes âgées – les personnes décédées du Covid-19 en France étaient toutes âgées de plus de 60 ans.
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