Pour faire face à la situation de blocage en Guyane, le gouvernement a approuvé un plan d’urgence de plus d’un milliard d’euros, dont 85 millions d’euros seront alloués immédiatement en faveur des centres hospitaliers de Cayenne et de l’ouest guyanais. Pour le Dr Stanley Caroll, délégué local de la CSMF et membre d'une coalition de médecins hospitaliers et libéraux, l'enveloppe annoncée « ne changera rien à la situation, le centre hospitalier de Cayenne a 30 millions d'euros de dette à lui seul et doit subir d'énormes travaux ». Sur place les barrages n'ont d'ailleurs pas été levés et les négociations continuent.
La santé est au cœur des contestations qui secouent le département. L'annonce de la cession du centre médico chirurgical de Kourou (CMCK), appartenant à la Croix Rouge, à un groupe privé a été un des déclencheurs de la protestation. La ministre des Outre-mer, Ericka Bareigts, a fait état de l'abandon du rachat « en faveur d'un projet de service public ». Au-delà du problème particulier du CMCK, c’est l’ensemble du système de santé guyanais qui a été laissé à l’abandon, comme le confirment plusieurs médecins locaux contactés par « Le Quotidien ».
Le Centre hospitalier de Cayenne en déficit chronique
« L'offre de soins n'a pas suivi l'accroissement de la population qui a doublé ces 20 dernières années », constate le Dr Christian Magnien, médecin libéral installé près de Cayenne. « Le Centre hospitalier de Cayenne est toujours en déficit, soupire le Pr Mathieu Nacher, du centre hospitalier de Cayenne, responsable du COREVIH de Guyane cela fait 14 ans que je suis installé là et que je vois défiler les commissions, les ministres et les brochettes de sénateurs sans que rien ne change. » À saint Laurent-du-Maroni, ce sont 20 millions d'euros qui manquent pour boucler le budget de la reconstruction de l'hôpital.
Il y a 15 ans, la région comprenait 3 cliniques chirurgicales privées, il n'y en a plus qu'une seule, la clinique Véronique propriété du groupe Kapa, par ailleurs en difficulté financière. Des repreneurs se sont manifestés « mais personne ne fait le choix car la caisse de dépôt et de consignation est propriétaire de 49 % de la clinique, précise le Dr Caroll, en attendant, les praticiens à diplôme français installés depuis des années sont en train de partir ».
54 % de Guyanais à la CMU
La Guyane compte officiellement 250 000 habitants selon l'INSEE, un chiffre qui ne prend pas en compte les étrangers vivant sur le territoire. Plus de la moitié des habitants, 54 %, sont bénéficiaires de la CMU, et 20 000 personnes sont officiellement inscrites à l'aide médicale d'État, avec plus de 50 nouvelles demandes par semaine. La démographie médicale y est au fond du gouffre avec 42,5 généralistes pour 100 000 habitants (contre 105 au niveau national) et de 18,5 spécialistes pour 100 000 habitants. La moyenne d’âge est de 55 ans chez les généralistes et de presque 60 ans chez les spécialistes.
Des spécialités comme la rhumatologie ou la chirurgie vasculaire sont totalement absentes, tandis qu'un seul neurologue et un seul pneumologue sont en activité. Le territoire est en outre dépourvu de pet scan. Malgré la forte prévalence de diabète, seulement deux endocrinologues sont installés dans la région.
Renforcer l'attractivité
Les revendications sont nombreuses, à commencer par la création d'une zone franche fiscale et sociale pour toute la Guyane et une augmentation du coefficient géographique (T2A). « Il est actuellement de 0,26 pour les établissements de santé alors qu'il faudrait qu'il soit au moins de 0,32 car les équipements sont plus chers à acquérir et à entretenir en Guyane », précise le Dr Caroll.
Autre point qui cristallise les mécontentements : l'autorisation accordée aux médecins originaires de pays hors Union Européenne d’exercer de plein titre. « Nous demandons simplement qu'il leur soit imposé un stage prolongé, dans l’hexagone ou en Guyane, ou qu'on les inscrive comme praticiens associés pour ne pas avoir à les inscrire à l’œrdre », indique le Dr Caroll.
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