Le Dr Jean-Paul Vallon ne décolère pas. Depuis quelques jours, il a été informé que certains formulaires de la Sécu ne lui seront plus livrés au cabinet comme auparavant, par transporteur. Le généraliste, installé à Apt (Vaucluse), devra lui-même se déplacer au point d’accueil de l’Assurance-maladie le plus proche de son domicile… à Cavaillon.
Il lui faudra donc parcourir 65 km (aller et retour), soit plus d’une heure de route, et se présenter aux horaires d’ouverture de la caisse… entre 8 h 30 et 16 h 30 (fermeture entre 12 h 30 et 13 h 30), pour récupérer ces documents.
Impossible de les télécharger pour s’éviter ce déplacement : ces formulaires de prescription non pré-identifiés, sur lesquels ne figurent pas le nom du médecin (bons de transport, demandes de cures thermales…), ne sont pas disponibles sur le site Ameli Pro, afin de prévenir la fraude, précise la Sécu.
Une mesure « horripilante »
« L’attitude de la caisse est horripilante, s’indigne le Dr Vallon.Ces formulaires constituent un service aux patients, pas aux médecins. La moindre des choses, c’est que la Sécu nous aide sans rajouter des contraintes. » Autant dire que le généraliste et les 7 confrères de ce gros cabinet de la région sont furieux.
Pour le faire savoir, ils ont affiché un mot à destination des patients. « Il est hors de question d’accepter cette nouvelle lubie des caisses. Aucun formulaire ne sera plus rempli […] », écrivent-ils. « Quand notre stock de formulaires sera épuisé, on n’en délivrera plus », précise le Dr Vallon. Conscients du préjudice causé aux patients, ils invitent ces derniers à « prendre contact avec leurs caisses pour protester contre cette consternante décision ».
Mesure d’économie pour la Sécu
Interrogée par « le Quotidien », l’Assurance-maladie confirme que cette mesure restrictive est en place depuis le 10 mars dans le Vaucluse. Les médecins en ont été informés à travers un message affiché en ligne sur l’espace Ameli Pro du département. Les nouvelles modalités de mise à disposition des documents sont détaillées.
« Le fait de limiter l’acheminement des formulaires constitue un important levier d’économie. Au final, cela profite aux patients », justifie la CNAM au « Quotidien » . La caisse du Vaucluse ne serait d’ailleurs pas la seule à agir de la sorte en France.
L’Assurance-maladie reconnaît toutefois que, dans le cas des médecins éloignés d’un point d’accueil, cela constitue une contrainte. On conseille donc à ces praticiens de regrouper leur commande annuelle, afin de n’avoir à se déplacer qu’une seule fois. « Ce n’est pas acceptable, s’agace le Dr Vallon. Ce serait une fois tous les deux ans que ce serait pareil. C’est une question de principe. »
Pour la caisse du Vaucluse, il n’existe pas d’autre solution à ce jour. Elle envisage cependant de faire un point sur le sujet, sans en préciser la date. Le cas des médecins d’Apt pourrait être évoqué à cette occasion.
Mise à jour (18 avril 2016) : les médecins d'Apt et des environs entendus par la CNAM
Suite à la parution de cet article, la caisse nationale d’assurance-maladie apporte les précisions suivantes.
À partir du 21 avril, les médecins exerçant à Apt et dans les environs pourront se procurer les formulaires de prescription de transport directement au point d’accueil de la ville, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent. Les professionnels concernés en ont été avertis ce 18 avril. La CNAM tient à préciser qu’elle « entend veiller à ce que les modalités d’acheminement des formulaires de l’Assurance Maladie tiennent compte des contraintes des professionnels de santé ».
Contrairement à ce qui avait été initialement indiqué au « Quotidien » par la CNAM, la caisse primaire du Vaucluse n’avait pas modifié ses modalités d’approvisionnement des formulaires de prescription de transports sanitaires pour des raisons d’économies, mais pour « réduire les risques d’usages frauduleux ». « Ces modalités ne s’appliquent que pour les formulaires non nominatifs où ne figurent pas l’identité du médecin prescripteur, et qui peuvent ainsi donner lieu à des usages détournés s’ils font l’objet d’une erreur d’adressage », précise la caisse.
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