Environ 2 cas de tuberculose sur 3 déclarés en France concernent des personnes nées à l’étranger et fraîchement immigrées. Dans un article paru mardi dans le Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire (BEH), Guillaume Rieutord de l’hôtel-Dieu, aidé de médecins travaillant au Centre d’accueil, de soin et d’orientation (Caso), ont analysé rétrospectivement les 2 904 dossiers des patients étrangers accueillis au Caso entre le 1er janvier et le 31 décembre 2012, et ont observé un faible taux de dépistage, tout en dressant des pistes d’amélioration.
Un dépistage refusé dans 2 cas sur 3
Une radiographie du thorax n’est proposée qu’à 37,3 % des patients, et réalisée chez seulement 31,5 %. « Ce constat est marquant car, si le taux de réalisation du dépistage est insuffisant, l’intérêt de ce dernier peut être remis en question », rappellent les auteurs pour qui le taux de dépistage s’explique par la complexité des consultations auprès de patients avec qui la communication est souvent difficile. Un constat partagé par le Dr Jeanine Rochefort, responsable du Caso de Seine-Saint-Denis : « Nous ne disposons pas du temps et des circonstances qui permettent de proposer systématiquement un dépistage, remarque-t-elle, les patients viennent avec des pathologies dont on doit s’occuper en priorité. Il faut du temps pour amener la question de la tuberculose dont la représentation est très stigmatisante dans ces populations. »
La précarité des migrant (75 % vivaient dans un logement précaire et 67 % n’avaient aucun revenu) les pousse en outre à refuser « plus de 2 fois sur 3, les dépistages de la tuberculose, du VIH et de l’hépatite car ils ne sont pas prêts à gérer une pathologie chronique », poursuit le Dr Rochefort pour qui il ne sera jamais possible d’aller au-delà de 50 % de dépistage réalisé.
Une méconnaissance des zones épidémique
Pour le Dr Rochefort, un travail de formation et de sensibilisation reste nécessaire auprès des personnels des Caso. Un avis confirmé par le résultat d’un questionnaire distribué auprès des praticiens du Caso. Si 96 % d’entre eux considéraient la tuberculose comme un enjeu de santé publique, seule la moitié connaissaient les zones de forte épidémie.
L’autre problème réside dans les 44 % de patients perdus de vue sur les 55 dont les radiographies du thorax étaient considérées comme anormales. Ce résultat surprend un peu le Dr Rochefort pour qui « il faudrait savoir ce qu’ils entendent par une radiographie anormale ».
Les auteurs proposent une simplification des procédures administratives par l’utilisation d’une fiche d’information standardisée, ainsi qu’un raccourcissement du parcours de soin. « Nous devons boucler le dépistage, l’interprétation et la prise du prochain rendez-vous en 48 heures », explique le Dr Rochefort. Le recours à une unité mobile de radiographie, comme celle qui vient tous les mardis au Caso apparaît comme une démarche facilitatrice.
En France, le dépistage est systématique chez les étrangers primo arrivant par l’office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) auquel échappent les étrangers en situation irrégulière. Le département de la Seine-Saint-Denis présente une prévalence de 27 cas pour 100 000 habitants (contre 7,5/100 000 en France). Dans la population qui consulte dans le Centre d’accueil, de soin et d’orientation de Seine-Saint-Denis, cette prévalence atteint même 172/100 000.
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