Quelques jours après le début de la campagne de vaccination contre le Covid – entamée le 27 décembre dans les EHPAD –, la stratégie de l'exécutif s'est retrouvée sous le feu des critiques, forçant le gouvernement à changer de braquet.
Trop lente, trop prudente, trop protocolisée – avec seulement 516 personnes vaccinées au 1er janvier – les reproches se sont accumulés ces derniers jours, y compris dans le monde de la santé. Au point que l'Elysée a décidé d'accélérer la cadence dès cette semaine et de faire vacciner à partir d'aujourd'hui les soignants de plus de 50 ans ou ayant une comorbidité. À la faveur d'une visite à l'Hôtel-Dieu (Assistance publique – Hôpitaux de Paris), le ministre de la Santé Olivier Véran a indiqué que « plusieurs milliers de personnes » ont été vaccinées aujourd'hui.
Un scandale d'État
Il n'empêche, ce lundi, le président de la région Grand Est (et médecin urgentiste) Jean Rottner a carrément dénoncé « un scandale d'État » au regard des longs délais de la campagne de vaccination. « On poursuit une politique qui a fait la preuve de son échec par le passé : les masques, les tests, aujourd'hui la vaccination », a-t-il critiqué sur France 2, pointant du doigt une forme « d'impréparation, d'irresponsabilité ». « On se moque de nous. Aujourd'hui, se faire vacciner, cela devient plus compliqué que d'acheter une voiture », a-t-il tancé. « Il faut que les choses s'accélèrent, être extrêmement transparent vis-à-vis des Français », a-t-il plaidé, réclamant que les collectivités locales puissent être à l'origine de commandes de vaccins et que tous les professionnels de santé puissent vacciner.
MG France monte au front
Du côté des syndicats de médecins libéraux, l'agacement a également pointé. Pour changer de braquet et montrer l'exemple, MG France a demandé que les médecins généralistes et les professionnels libéraux de proximité bénéficient eux-mêmes d’une vaccination dans l'EHPAD le plus proche de leur lieu d’exercice, tout en apportant leur concours aux personnels. « Aucun médecin généraliste ne dispose à ce jour des doses nécessaires pour vacciner, ni du lieu ou du calendrier de délivrance des vaccins », déplore aussi le syndicat. Il juge « urgent » d’organiser la phase ambulatoire de la vaccination pour les personnes vulnérables et exige une mise à disposition « rapide » des doses nécessaires aux médecins libéraux.
L’UFML-Syndicat appelle également à une vaccination rapide des soignants « dès maintenant et quel que soit leur âge » et refuse que la campagne vaccinale « courre à l’échec » en reproduisant le modèle de communication obsolète autour des masques et autres moyens de protection. L’UFML-S demande également que l’état des stocks de vaccins soit rendu public chaque jour, et la liste des lieux de vaccinations et les modalités d’articulation avec la médecine de ville publiée sans attendre.
Précautions « excessives »
Plusieurs instances scientifiques ont recommandé l'accélération du processus. L'Académie des sciences s'inquiète de la lenteur du plan de vaccination en France, avec « une mise en œuvre très progressive de la campagne » liée au recueil du consentement et à la recherche de contre-indications. Une « extrême prudence » sanctionnée par un démarrage « très lent » du programme hexagonal, comparé à celui de pays européens voisins. « Ces précautions excessives risquent de susciter une incompréhension croissante vis-à-vis d’une campagne dont le coup d’envoi semble manquer de détermination », conclut-elle.
De son côté, l'Académie de médecine a exhorté à « simplifier et raccourcir autant que possible les procédures de vaccination dans les EHPAD et établissements assimilés ». L'institution demande une « pleine transparence » sur l’état des stocks de vaccins disponibles pour que la stratégie n’apparaisse pas dictée par des aléas de livraison.
Interrogée ce lundi sur France Inter, la présidente de la commission technique des vaccinations de la Haute Autorité de santé (HAS), le Pr Élisabeth Bouvet, a souligné que la stratégie restait la même, à savoir cibler les personnes les plus vulnérables et les professionnels de santé, en élargissant « quand on peut, si on a le nombre de doses nécessaire ». L'infectiologue a toutefois reconnu que la mise en œuvre de cette stratégie devait « probablement s'accélérer » tout en précisant que la HAS n'avait « jamais demandé » qu'il y ait cette lenteur…
[Article mis à jour ce lundi à 18 heures. ]
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