Est-ce l’effet de la conjoncture ou le signe d’une désaffection durable des médecins libéraux pour leurs syndicats ? Après le scrutin de la semaine dernière, marqué par une abstention historique, on continue de s’interroger. Ce n’est pas la première fois que le Covid perturbe l’exercice de la démocratie : il a déjà rendu peu lisibles les résultats des municipales et a failli menacer la tenue des régionales. Dans ces conditions, on dira qu’il était logique que ces élections professionnelles aient, elles aussi, fait les frais de la pandémie. La campagne — virtuelle à tous les sens du terme — n’ayant pas réussi à atteindre ses cibles ; et le corps médical ayant bien d’autres choses à penser actuellement…
L’explication pourtant ne suffit pas pour comprendre ce qu’il faut bien appeler un fiasco, quatre électeurs sur cinq n’ayant pas jugé utile de voter. En comparaison, les pharmaciens ont été un sur deux à s’exprimer, les dentistes à peine moins. Et le recours, pour la première fois, au vote électronique aurait dû faciliter la démarche de confrères débordés. Il faut donc se rendre à l’évidence : les médecins semblent se retrouver de moins en moins dans leurs Unions, dans ceux qui les animent et, au plan national, dans les leaders qui représentent la profession. La tendance s’est accentuée, mais ce n’est pas nouveau, la participation ne cessant de chuter depuis 25 ans.
L’autre enseignement à retenir de cette consultation, c’est la balkanisation du secteur. Pas moins de huit listes — un record ! — étaient cette fois-ci proposées. Cet éparpillement se conjugue avec les succès des organisations monocatégorielles, de généralistes comme de spécialistes. Et avec une prime aux nouvelles têtes au détriment des caciques, annonçant l'avènement d'un syndicalisme plus conflictuel que contractuel.
Les conséquences de ce tohu-bohu sont encore difficiles à évaluer. On s’en rendra mieux compte dans les prochaines semaines, à la faveur du « deuxième tour » qui renouvellera les bureaux des Unions et de la reprise au plan national des négociations avec la CNAM. Mais déjà, es retours d'expérience doivent être posés. Pour les syndicats, il s’agit d’ouvrir rapidement une réflexion existentielle sur leur positionnement, leurs alliances et leur programme s’ils ne veulent pas être marginalisés. À court terme, il va leur falloir donner le change dans des négociations cruciales avec l’Assurance-maladie, laquelle pourrait être tentée de tirer avantage de sa position face à des partenaires si mal élus : le contournement des médecins au profit d’une négociation interpro n’étant plus à exclure. Attention, toutefois : les pouvoirs publics doivent aussi avoir à l’esprit que ce scrutin catastrophe est révélateur avant tout d’un profond malaise des médecins de ville. Un signal à ne surtout pas négliger.
Exergue : Les médecins libéraux semblent se retrouver de moins en moins dans leurs Unions et dans ceux qui représentent la profession
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