Les propos de la ministre de la Santé Agnès Buzyn sont décidément restés en travers de la gorge des hépatologues français, réunis à Paris à l'ouverture du congrès international du foie (ILC 2018).
Lors d'un entretien accordé à « Libération », Agnès Buzyn avait pris les services d'hépatologie comme exemple de lieux où des lits pouvaient être économisés. « Regardez en hépatologie, on soigne et on guérit des hépatites avec des médicaments sans hospitaliser les malades ; il y a donc des lits qui devraient basculer », avait-elle affirmé. Des propos qu'elle avait réitérés à plusieurs reprises dans les médias.
« Les patients hospitalisés ne sont pas des patients atteints d'hépatite C, a réagi le secrétaire général de l'AFEF, le Pr Christophe Bureau (service d'hépato-gastroentérologie au CHU de Toulouse). Les données PMSI sont invariables depuis une dizaine d'années : la majorité des patients hospitalisés dans les services d'hépato-gastroentérologie sont des patients avec une cirrhose nutritionnelle décompensée, c'est-à-dire des patients avec des consommations d'alcool mais aussi des facteurs de risque métabolique. » Pour le Pr Bureau, l'hépatite C est un motif de consultation et non d'hospitalisation, et l'élimination virale espérée pour 2025 ne devrait pas impacter les taux d'hospitalisation pour des motifs tels que les hémorragies digestives par rupture de varices œsophagiennes ou les cirrhoses alcooliques.
« Si on supprime des lits, ces patients-là devront être traités ailleurs, en hématologie par exemple, car il faudra de toute façon les hospitaliser », prévient le Pr Bureau. L'AFEF prépare un document qui reprendra les chiffres actuels des motifs d'admission en hospitalisation. Dans le service du Pr Bureau, 800 admissions pour cirrhose sont recensées chaque année, dont 80 % de cirrhoses alcooliques. « Ces malades nous arrivent en urgence et restent une dizaine de jours, on n'est pas dans une démarche de savoir si on peut faire une opération en ambulatoire. On les garde parfois un peu longtemps car on a des problèmes d'aval, mais ce flux de patient reste constant car nous n'avons pas en France une politique forte de réduction des risques », fait observer le spécialiste. Le Pr Bureau est rejoint dans ses propos par le Dr Marc Bourlière, de l'Hôpital Privé Beauregard à Marseille : « La fin de l'hépatite C ne signifie pas la fin des services d'hépatologie », conclut-il.
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