Attendu depuis des mois par la communauté hospitalière, le plan d'action du gouvernement visant à améliorer les conditions de travail des médecins et soignants hospitaliers a été présenté ce lundi au ministère de la Santé par Marisol Touraine.
S'adressant à un aréopage de représentants du monde hospitalier (FHF, conférences, etc.), puis aux médias, la ministre de la Santé a mis les petits plats dans les grands, déclinant une nouvelle fois le principe de « stratégie nationale » pour rendre compte de l'importance de ce dossier particulièrement sensible. Entre le suicide du Pr Jean-Louis Mégnien à l'hôpital européen Georges-Pompidou (AP-HP) fin 2015 et la vague nationale de décès d'infirmiers, les douze derniers mois ont été particulièrement meurtriers à l'hôpital.
L'objectif est de « donner une impulsion nationale forte, volontariste, avec des moyens à la hauteur des enjeux, a assuré la ministre à la communauté hospitalière. Il ne s'agit donc pas de tout réinventer mais de susciter de nouvelles initiatives ».
30 millions pour les services de santé au travail
Le gouvernement compte débloquer 30 millions d'euros sur trois ans pour étendre à l'ensemble des groupements hospitaliers de territoire (GHT) la création d'équipes pluridisciplinaires – composées de psychologues, d'assistants sociaux et de conseillers en prévention des risques professionnels. Ces services de santé au travail élargis constitueront une cellule d'écoute pour les professionnelles en souffrance. « Ils contribueront (...) à un accompagnement personnalisé des professionnels en situation de fragilité professionnelle ou personnelle, ou de professionnels de retour au travail après une longue absence et nécessitant un aménagement des fonctions », détaille ce volet du plan, le seul chiffré et inscrit dans le temps.
Pour mieux détecter les risques psychosociaux, les professionnels auront accès à un dispositif d'écoute (pour un soutien psychologique) mais aussi à des groupes d'expression et d'analyse des pratiques professionnelles, animés par des intervenants extérieurs ou internes à l'établissement (et formés à ce titre). La ministre appelle les hospitaliers à signaler de façon systématique et obligatoire les suicides (et tentatives) dans le cadre d'un dispositif de déclaration similaire à celui des événements indésirables graves.
Marisol Touraine a prévu « prochainement » la création d’un vivier régional de médiateurs (sur le modèle du médiateur de la République) pour rechercher une issue favorable à des situations de tension au sein d'un hôpital ou d'un service. Composée de médecins, de directeurs et de soignants volontaires et formés, cette plateforme sera mobilisée à la demande des structures ou des professionnels vulnérables « dans le cas de situations qui ne peuvent pas se régler dans l'établissement et qui [sont alors] réglés à l'extérieur dans une perspective d'apaisement », a précisé la ministre. Un médiateur national sera nommé auprès d'un observatoire de la qualité de vie au travail créé pour l'occasion.
Des entretiens individuels annuels seront systématisés pour les paramédicaux et mis en place pour les médecins (avec l'objectif de généralisation) afin de « renforcer l'écoute et la reconnaissance individuelle ».
Recyclage
La formation des professionnels au repérage et au management des risques psychosociaux à l'hôpital est la deuxième grande priorité. L'intégration d'un module « qualité de vie au travail » dans les maquettes de formation initiale médicale, paramédicale et de directeurs d'établissement est au programme, ainsi qu'une formation au management, à la gestion d'équipes et à la résolution de conflits. Il est aussi question de généraliser « le codéveloppement, le coaching et le mentorat » entre cadres hospitaliers. Comment ? Mystère.
Faisant la jonction avec les discussions en cours avec les syndicats de PH, la ministre a inclus dans sa stratégie un volet pour l'attractivité de la médecine du travail. De même, elle recycle la thématique du temps de travail à l'hôpital en rappelant sa volonté « d'adapter le régime indemnitaire et de mieux valoriser les sujétions liées aux cycles de travail nécessaire à la prise en charge des patients H24 ».
L'amélioration des conditions de travail passe aussi par le renforcement de la sécurité des professionnels, via un plan d'action financé à hauteur de 75 millions d'euros sur trois ans et déjà présenté en octobre dernier. Au rayon littérature, enfin, un guide de prévention des risques psychosociaux sera diffusé « avant la fin de l'année » auprès des internes et des assistants.
Le second volet de cette stratégie concernant cette fois les professionnels libéraux sera présenté début 2017. « Je suis déterminée à porter au niveau national un plan ambitieux pour prendre soin de ceux qui nous soignent […], soulager les situations difficiles et rendre aux hospitaliers la fierté de leur travail magnifique », a rapidement commenté ce lundi la ministre, soucieuse de s'éloigner des médias alors qu'un remaniement se prépare.
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