LA FRANCE constate, non sans amertume, que ses échanges avec la Russie ont chuté de 23 % en 2009. Cette baisse est due à un recul du PIB russe de quelque 8 % l’an dernier, mais elle souligne que, par rapport à l’Allemagne, qui a des relations commerciales privilégiées avec Moscou, nous avons beaucoup de chemin à parcourir.
Il n’est pas facile de négocier avec le pouvoir russe. GDF-Suez doit entrer dans le capital du gazoduc Nord Stream, mais Allemand et Hollandais détiennent une partie de ce capital et Gazprom, le géant énergétique russe, ne veut pas que sa propre part descende au-dessous de 50 %. Remarquons déjà que l’hégémonie russe dans le domaine de l’énergie est acceptée par l’Union européenne, bien que les Russes aient fait de leurs ressources en pétrole et en gaz un instrument de dissuasion à l’égard de leurs ex-concitoyens de l’URSS. Par deux fois au moins, ils ont arrêté leurs livraisons de gaz et de pétrole aux Ukrainiens (qui n’avaient pas les moyens de payer) et bloqué du même coup l’approvisionnement de l’Europe occidentale, plus particulièrement de l’Allemagne. Cela donne la mesure de leur fiabilité au moment où les États-membres de l’Union se disputent les contrats avec Gazprom. Nord Stream doit relier la Russie directement à l’Allemagne et son financement est évalué à 10 milliards de dollars.
Des navires à vendre.
L’autre dossier concerne la vente à la Russie de quatre navires de guerre Mistral, des porte-hélicoptères tellement performants qu’un général russe a cru bon de dire que, s’il les avait eus, il aurait réglé la question géorgienne (août 2008) en quelques heures plutôt que quelques jours. Il est dommage que nous n’excellions, en l’occurrence, que dans le domaine des armements. Le Mistral est parfaitement adapté à la guerre asymétrique et tous les pays nous l’envient. On est néanmoins en droit de se demander si, pour améliorer notre balance commerciale avec la Russie, nous devons lui procurer des navires qu’elle risque de tourner un jour contre nos alliés en Europe (ou contre nous-mêmes). La guerre froide est terminée, mais la ligne politico-stratégique de Moscou continue à considérer l’OTAN comme la première menace qui pèse sur le Russie. Il est étrange que la France ait adopté le point de vue inverse, à savoir que les Russes sont nos amis, bien qu’ils n’aient pas encore consenti à le dire.
LE RÉVISIONNISME HISTORIQUE EST PEUT-ÊTRE LA DÉRIVE RUSSE LA PLUS GRAVE
Comme la visite du président Medvedev est l’un des points forts d’une année consacrée à la Russie en France et à la France en Russie, inutile de dire que notre gouvernement se sera bien gardé, à l’occasion de la rencontre Sarkozy-Medvedev, de soulever la question de la liberté d’expression : l’oblitération des médias, le sort réservé aux journalistes un peu curieux par des assassins que la justice russe ne retrouve jamais, le retour rampant du culte de Staline, facilité par un Vladimir Poutine qui cherche désormais à écarter Medvedev de sa route alors que le même Medvedev souhaite être réélu à son poste, le tableau est consternant.
Staline, ce brave homme.
Le révisionnisme historique orchestré par le Kremlin présente Staline comme un bon père de famille qui a protégé les Russes contre Hitler et leur a donné leurs plus grandes heures de gloire: c’est un phénomène très alarmant parce qu’il nie la réalité historique. Il y a encore beacoup de communistes en Russie et ils ont des députés à la Douma. Les manifestations qui exaltent le souvenir de Staline ne sont ni rares ni dérisoires. Traumatisés par les horreurs du capitalisme qui, à deux ou trois reprises, a failli ruiner la Russie, ceux des Russes qui ne basculent pas dans le néo-nazisme sous des formes diverses expriment leur nostalgie de l’ordre communiste et leur vénération d’un « petit père du peuple » qui a conduit des millions de leurs compatriotes au Goulag ou les a envoyés à la mort sans autre forme de procès. Que Poutine, pour se maintenir au pouvoir, encourage hypocritement le souvenir faussé de l’un des monstres politiques du XXè siècle (il partage la médaille avec Hitler et Mao) devrait nous inviter, nous Français, à plus de circonspection lorsque, pour gagner un peu d’argent, nous nous apprêtons à livrer à Moscou des navires de guerre.
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