« Protections, affaires et gaspillages » : ainsi sous-titré, l’ouvrage annonce la couleur d’une enquête à charge qui s’intéresse au conseil national de l’Ordre des médecins, institution méconnue du grand public.
La justice ordinale n’est pas épargnée. L’auteur, journaliste, cite une affaire dans laquelle, selon lui, l’institution aurait fait preuve de mansuétude à l’égard d’un praticien ayant provoqué, par ses atermoiements, la mort d’un nouveau-né. Il cite un conseiller ordinal qui lui confie : « nous sommes parfois plus sévères avec des praticiens qui ont des retards de cotisation ».
René Chiche relate ensuite le cas d’un médecin parisien radié à vie par l’Ordre pour avoir mélangé commerce et art médical. Il le compare à un autre praticien, célèbre nutritionniste médiatique, et créateur d’un site internet très visité, « où il apparaît en photo sur la page d’accueil, et dont l’aspect marchand et les ambitions lucratives ne sont nullement cachés ». Mais l’industrieux praticien prend soin, lorsqu’il s’affiche, de se présenter comme un expert en nutrition et non comme un médecin. Commentaire cinglant d’un ordinal : « S’il suffit de s’autoproclamer expert pour faire sa promotion personnelle (sans risquer les foudres ordinales), à quoi rime notre code de déontologie ? »
Trésorerie.
L’auteur aborde le chapitre sensible de l’argent. Il épluche les comptes 2011 de l’Ordre et constate que, sur un budget annuel d’environ 75 millions d’euros, le poste « indemnisation des conseillers ordinaux » représente un peu plus de 2 millions d’euros, et que celui des « déplacements et missions » affiche 1,7 million. À quoi il convient d’ajouter un demi million d’euros de « frais du conseil ». Selon un député socialiste cité dans l’ouvrage, les indemnités annuelles d’un conseiller national peuvent avoisiner les 96 000 à 144 000 euros. René Chiche constate aussi que l’Ordre est assis sur un joli magot : une trésorerie de près de 65 millions d’euros.
Le psychodrame ayant précédé la dissolution de l’Ordre de Paris en 2007 est également raconté. D’élections annulées en révélations sur les indemnités perçues par certains membres du bureau, un rapport de l’IGAS avait tranché. Il pointait « une gouvernance en panne » et des rémunérations « susceptibles d’être pénalement qualifiées ». Le 22 octobre 2007, Roselyne Bachelot demandait officiellement au CNOM de prononcer la dissolution de l’Ordre de Paris. Ce qu’il fera en traînant les pieds, et en assurant qu’« aucune malversation » n’avait été établie dans ce dossier.
Bronca.
Dans un autre chapitre, René Chiche aborde le fameux pas de clerc de l’Ordre en mai 2012. Le Conseil national se réunit alors en séminaire et rend publiques des recommandations qui font l’effet d’une bombe : contrainte à l’installation et encadrement du secteur II. Certains murmurent que le CNOM a voulu donner des gages au pouvoir socialiste. L’initiative provoque une bronca interne : environ 80 conseils départementaux (sur 103) rédigent des motions désavouant les mesures préconisées. « J’ai commis une erreur de communication », avoue le Dr Michel Legmann, président du CNOM.
« Le conseil de l’Ordre ne sera peut-être pas supprimé comme l’avait promis François Mitterrand en 1981, conclut René Chiche, mais il devra forcément être transformé dans les dix ans qui viennent ».
(*) : Enquête sur les mandarins de la médecine, Ed. du Moment. 18,50 euros.
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