PROS (CLOVES et apparentés)

Identifier les patients et les adresser !

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Publié le 27/09/2018
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Crédit photo : DR

L’acronyme PROS (PIK3CA Related Overgrowth Syndrome) désigne l’ensemble des tableaux cliniques liés à une mutation mosaïque du gène PIK3CA (NIH, conférence de consensus de 2015). La recherche (génétique, biologie, anticancéreuse) révèle ici une entité clinique !

Gène ubiquitaire, PIK3CA assure la croissance et la division normale de toute cellule nucléée du corps. La voie de signalisation PIK3CA/AKT/mTOR normalement régulée (freinée) très finement peut se retrouver activée en excès dans certains cancers (sein…) ou le PROS. La mutation du gène PIK3CA, de type « gain de fonction » produit une protéine PIK3CA sans bouton « off », donc toujours active.

Lors de l’embryogenèse toute mutation est mosaïque. Plus elle est précoce, plus elle affecte de cellules filles. Si PIK3CA mute plutôt en début d’embryogenèse, elle touche de nombreux tissus et la présentation est sévère dès la naissance ; à l’opposé, vers la fin la clinique est discrète (« un gros doigt », « un gros pied », une hypertrophie vasculaire…). « La mutation mosaïque de PIK3CA explique l’extrême variabilité clinique… et le diagnostic difficile ». La prolifération peut intéresser plusieurs tissus ou être surtout graisseuse ou veineuse, lymphatique, musculaire, osseuse…

Le Dr Canaud donne une clé diagnostique : « L’augmentation asymétrique de volume d’un membre ou d’une extrémité est présente dans l’immense majorité des cas. Elle est très évocatrice du PROS. Elle doit faire rechercher de possibles autres anomalies ! ». Devant un syndrome d’hypertrophie isolée (un doigt, un membre, un organe, une anomalie veineuse…), évoquons une mutation PIK3CA.

Adresser les patients

BYL719 stoppe l’activation de PIK3CA. Il bloque le domaine kinase de PIK3CA qui par phosphorylation recrute la voie AKT/mTOR. Depuis la publication dans Nature, les mails affluent et Espagne, Nouvelle-Zélande, Suède, USA autorisent des utilisations compassionnelles ponctuelles. « BYL719 n’est disponible en France que sous ATU nominative très stricte : formes très graves engageant le pronostic vital ou chirurgie mutilante programmée. Mais Novartis vient d’annoncer dans le cancer du sein, le bénéfice en phase III de BYL719 (mutations PIK3CA présentes). Des demandes d’autorisation d’AMM devraient suivre et la production continuer », espère le spécialiste.

En France 1 000 à 2000 patients seraient atteints (pas de registre). La maladie serait ancienne, également répartie sur le globe. « Depuis juin, par raccourci réducteur, les médias se focalisent sur le syndrome de CLOVES (Congenital Lipomatous Overgrowth, Vascular malformations, Epidermal naevi, Spinal/squeletal anomalies or scoliosis). Mais PROS c'est aussi une myriade d’atteintes isolées potentiellement ciblable par BYL719 : macrodactylie, mégalencéphalie ou hémiencéphalie (MCAP ou M-CM), atteinte osseuse d’un membre ou de la tête, vaisseaux variqueux engainant un membre pouvant obliger à amputer… ! ». Devant toute hypercroissance, évoquons une explication génétique sous-jacente, souvent PIK3CA, et adressons le patient aux MAGEC (centres de référence des maladies génétiques à expression cutanée des CHU). Un traitement devrait arriver !

« À Necker, nous répondons aux demandes des médecins par mail (1) ou formulaire patient (2). Les patients affluent. Une prise en charge multidisciplinaire est en place. Chaque cas est discuté de façon collégiale. Soit il relève de l’ATU, soit il sera contacté pour un essai clinique dès que la molécule sera disponible », conclut le Dr Canaud.

Venot Q et al., Nature 2018;558(7711):540-546
(1) Guillaume.canaud@inserm.fr
(2) http://hopital-necker.aphp.fr/contacts-cloves/

Dr Sophie Parienté

Source : Le Quotidien du médecin: 9689