Des douleurs musculaires surviennent chez 10,5 % des patients après mise sous statines, selon l'étude observationnelle française Primo, soit une fréquence double de celle constatée dans les populations très sélectionnées des essais randomisés. Il s'agit presque toujours de simples myalgies (douleurs, crampes, faiblesse musculaire avec CPK peu ou pas augmentées), prédominant à la racine des membres inférieurs. Exceptionnellement, ces douleurs sont le reflet d'une myosite nécrosante (CPK augmentées ; incidence <0,003 %) ou d'une rhabdomyolyse (CPK augmentées et souffrance rénale ; <0,001 %).
Le mécanisme de ces complications reste mal connu, mais elles sont liées généralement à un effet toxique de la statine, réversible à l'arrêt du traitement. Plus rarement, il s'agit d'un processus auto-immun qui continue à évoluer après l'arrêt du médicament. Des myosites nécrosantes auto-immunes ont ainsi été décrites récemment, caractérisées par une nécrose sans infiltration inflammatoire majeure (Padala S, Atherosclerosis 2012). « L'hypothèse est que la statine, en se liant à l'HMG-coA réductase modifie la configuration tridimensionnelle de cette enzyme et dévoile de nouveaux épitopes », a expliqué le Dr Nicolas Poursac (CHU de Bordeaux) lors du congrès.
En pratique, devant un patient se plaignant de myalgies, il convient d'évaluer l'imputabilité en vérifiant la date d'instauration du traitement (la médiane de survenue des myalgies est d'un mois), la dose de statine, car la toxicité est clairement dose-dépendante, et les facteurs de risque d'intolérance : antécédents de douleurs musculaires sous hypolipémiant (OR : 10 dans la cohorte Primo), de crampes inexpliquées (OR : 4) ou de CPK élevées avant traitement (OR : 2), antécédents familiaux de crampes,
hypothyroïdie.
En cas de myalgies avec CPK normales, il faut arrêter ou diminuer la dose de statine, selon la sévérité des symptômes, et réévaluer après 3 mois. Soit les signes persistent et il faut chercher une autre cause. Soit ils ont disparu et il est possible de réintroduire la même statine à une dose plus faible ou une autre statine. « Si la tolérance est correcte et le LDL dans la cible on ne fait pas d'autres modifications, a précisé le Dr Poursac. Si la cible n'est pas atteinte ou si les symptômes récidivent, il faut changer de classe thérapeutique. »
Devant des myalgies avec CPK élevés, il est impératif d'arrêter la statine et de discuter l'hospitalisation en fonction de la sévérité des symptômes, de la présence de signes respiratoires ou laryngés, et des résultats biologiques, des CPK très élevés faisant redouter une rhabdomyolyse. En cas de myosite nécrosante auto-immune (confirmée par la biopsie), le traitement repose sur les corticoïdes, les immunosuppresseurs, voire les immunoglobulines, le rituximab ou la plasmaphérèse. « La rareté de cette pathologie fait qu'il n'y a pas de traitement parfaitement
codifié », a précisé le Dr Poursac.
Myalgies sous statine :quelle réalité ?
Publié le 20/01/2017
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Myalgies
Crédit photo : SRINGER MEDIZIN/SPL/PHANIE
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Source : lequotidiendumedecin.fr
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