L’heure serait à la « délinéarisation » des carrières professionnelles. Demain, nous travaillerons à temps partagé pour plusieurs employeurs. Nous changerons d’employeur comme aujourd’hui (voire peut-être plus souvent), mais nous changerons aussi de métier, tous les 5 ou 10 ans. Les techniques que nous utilisons seront obsolètes en quelques années : tel fournisseur de services informatiques considère déjà aujourd’hui qu’au bout de 18 mois, les connaissances techniques d’un ingénieur ont besoin d’un sérieux rafraîchissement justifiant d’un changement de poste.
Dans une économie mondialisée, marquée par la standardisation des produits, la mise en concurrence des entreprises (voire des États, à travers leurs politiques fiscales et sociales) aboutira à multiplier les contrats de sous-traitance. Il faudra donc renforcer les politiques « qualité », la traçabilité de la production et la prescription du travail. Ces excès offriront peut-être d’ailleurs des espaces pour un retour à une production locale.
Les Nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) nous permettront de travailler depuis chez nous, dans le cadre de projets à durée déterminée pour lesquels nous aurons constitué de nouveaux collectifs de travail avec des collègues que nous n’aurons jamais rencontré ailleurs que sur internet. Le marché nous aura été attribué par le système des enchères inversées. Les plateformes électroniques de l’uberisation seront là pour offrir les compléments de revenu dont nous aurons besoin, mais elles toucheront aussi les financements entre particuliers (fintech) et les consultations juridiques. Comment contribueront-elles aux systèmes de protection sociale ?
Jusqu’à l’âge de 30 ans, beaucoup d’entre nous connaîtront la précarité à base de stages, de périodes de formation, de chômage et d’emploi à durée déterminée ou d’intérim. Entre 30 et 50 ans, les entreprises auront envie de bénéficier de nos compétences et nous profiterons de la stabilité du contrat à durée indéterminée. Au-delà, à nous les joies d’un auto-entreprenariat pas forcément choisi, mais dans lequel nous pourrons employer toutes les compétences techniques, organisationnelles et relationnelles acquises auparavant. Jusqu’à la retraite… pour laquelle, nous n’évoquerons pas ici d’âge précis.
La robotisation des activités se fera dans le cadre d’une économie circulaire, économe des ressources naturelles et de l’énergie. Pour l’alimenter, il nous faudra recycler la quasi-totalité de nos déchets, effaçant encore un peu plus les barrières entre notre vie professionnelle et notre vie privée. Comme tout ne pourra pas être automatisé de façon rentable, nous aurons recours à des travailleurs détachés à meilleur coût, dont certains maîtriseront mal le français. Le chômage endémique va encore croître, excluant du monde du travail de façon conjoncturelle, ou hélas plus durable, les franges insuffisamment formées de la population.
Tout va toujours plus vite. Grâce à des capacités d’innovation toujours augmentées et grâce aux capacités prédictives des relations « structure activité », il sera possible de mettre de plus en plus rapidement sur le marché de nouvelles molécules « raisonnablement » testées.
(1) INRS
(2) Département universitaire de Médecine et santé au travail, faculté de médecine, université Lille 2, Lille
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