Chronobiologie

Rythmes scolaires, la santé de l’enfant oubliée ?

Publié le 29/09/2017
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Depuis la rentrée, un tiers des communes ont fait marche arrière et sont repassées à la semaine de quatre jours. Alors que le gouvernement met en avant l’absence d’impact positif de la réforme sur les apprentissages, les chronobiologistes s’inquiètent des répercussions possibles sur la santé de l’enfant.
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Crédit photo : BURGER/PHANIE

Un pas en avant, un pas en arrière… En 2013, l’éducation nationale avait instauré le passage à la semaine de 4,5 jours pour coller davantage aux besoins physiologiques de l’enfant. À peine quatre ans plus tard, le gouvernement vient de faire machine arrière avec la publication, fin juin, d’un décret permettant aux municipalités de choisir par elles-mêmes l'organisation de la semaine scolaire. Exit donc, pour de nombreux enfants, le mercredi matin sur les bancs de l’école puisque près d’une commune française sur trois a rebasculé sur un rythme scolaire de quatre jours.

Un rétropédalage plébiscité par 64 % des Français, selon un sondage récent, et salué par l’Association des maires de France et la Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public (PEEP) mais pointé du doigt par de nombreux chronobiologistes qui craignent que l’enfant n'en fasse les frais.

Pour justifier sa décision, le ministère de l’éducation ne s’appuie que sur quelques études de faible envergure montrant que les effets de l’aménagement du temps scolaire sont négligeables, voire nuls, sur les résultats des élèves. Même constat, dans un rapport daté de juin 2015, où l’Inspection Générale de l'éducation nationale juge ces effets « non observables à ce jour ». Très attendue, l’évaluation des différents rythmes publiée fin juin par la division des études du ministère de l'éducation nationale (DEPP) n’est pas tellement plus contributive puisqu'elle n'a étudié que des rythmes de 5 jours.

Quant à l’impact sur la fatigue, là encore, les données manquent. La fatigue induite par le travail du mercredi matin est pourtant l’argument numéro 1 avancé par les partisans de la semaine de 4 jours. Pour l’Inspection générale, « on ne peut réfuter cette fatigue tant elle est souvent rapportée ».  Mais aucune évaluation objective n’a été publiée à ce jour.

En revanche, « plusieurs publications montrent que la semaine de 4 jours accentue la désynchronisation », assure le Pr François Testu, chronopsychologue (université de Tours). Surtout parmi les enfants les moins favorisés. En effet, avec des activités structurées, une émulation intellectuelle, un encadrement éducatif et une régularité des horaires de lever et de coucher, l'impact est limité. « Mais, pour la plupart des enfants, ce décalage va se traduire par des ruptures de rythme », prévient le Dr Sylvie Royant-Parola (psychiatre et neurobiologiste, Paris).

La régularité, élement primordial

Or, selon l’ensemble des recherches fondamentales en chronobiologie, la régularité est primordiale. « La régularité des signaux (lumière naturelle/artificielle, activités physiques, structuration des repas), organise la topographie temporelle des fonctions de l’organisme, précise le Dr Royant-Parola. Ainsi la rythmicité des fonctions de l’organisme comme la glycémie, la tension artérielle, la température interne, le cortisol, etc., s’organise selon un modèle propre à chacun. Des ruptures de rythme (désynchronisations) entraînent un décalage entre les différents rythmes, d’où un stress et une demande d’adaptation à l’organisme, génératrice de fatigue. »

Sur le plan biologique, on observe des variations de cortisol (avec répercussion sur le sommeil) mais aussi en cascade, la modification de la sécrétion d’autres hormones comme, celles régulatrices de l’appétit (leptine, ghréline),  ce qui prédispose à la prise de poids comme démontré dans de récentes études.

 Hélène Joubert

Source : Le Généraliste: 2807