Alors que les conclusions d'une mission sur les IJ, commandée par le Premier ministre Édouard Philippe, sont attendues dans les prochaines semaines, une généraliste a confié la semaine passée sur Twitter comment elle a vécu la « visite confraternelle » de son médecin-conseil. Convoquée pour « délit statistique » au sujet de ses arrêts de travail, cette expérience fut « source d’une certaine angoisse », a confié au Généraliste le Dr Isabelle de Ricaud, généraliste sur le bassin d'Arcachon et syndiquée à l'UFML.
Un interlocuteur « sympa et à l'écoute »
En octobre dernier, des généralistes de Saint-Brieuc (Côtes-d'Amor) s'étaient mobilisés face au nombre croissant de ces convocations pour « délit statistique » envoyées par la caisse locale, dénonçant les intimidations de certains médecins-conseils. Le Dr de Ricaud décrit pour sa part une visite « déstabilisante » même si elle a eu affaire à un interlocuteur « sympathique et à l'écoute », un médecin-conseil de 60 ans avec 15 années de libéral derrière lui. Jeudi dernier, ce dernier s'est rendu à son cabinet. La généraliste appréhendait cet entretien : « Ce côté jugement quand on a l’impression de ne rien faire de mal est désagréable. Je relativisais en me disant que je n’avais rien à me reprocher », raconte aujourd'hui la jeune femme de 35 ans.
Le médecin de la CPAM a tout d'abord expliqué au Dr de Ricaud installée depuis 5 ans pourquoi l'Assurance maladie surveille les arrêts de travail. Les deux médecins ont ensuite épluché le relevé d'activité de la généraliste. « J’ai 4 étoiles*, ne vous enflammez pas, ce n’est pas bon signe à la Sécu », plaisante-t-elle auprès de sa communauté Twitter. Cette « atypie » dans le nombre d'arrêts lui vaut donc la visite confraternelle du médecin-conseil. « Je suis loin d'une rencontre officielle à la CPAM et d'une mise sous objectifs », relativise le Dr de Ricaud. « Mais va pas trop falloir que ça grimpe », l'aurait prévenu le médecin.
MG boucs émissaires
Il n'en fallait pas plus pour titiller la généraliste. Elle décide alors de vider son sac devant le médecin-conseil et lui énumère toutes les difficultés auxquelles elle fait face en tant que généraliste pour les arrêts de travail : « les spécialistes qui disent avoir des quotas et ne prolongent pas leurs patients opérés ; les médecins du travail qui disent aux patients de se faire prolonger autant que possible ; les patients avec des troubles musculo-squelettiques, qui s’abîment sans que leurs employeurs ne fassent quoi que ce soit ». Le Dr de Ricaud confie par ailleurs qu'elle a « la sincère impression d’être le vilain médecin généraliste, qui voit 150 patients par semaine, larbin des spés pour les arrêts et délinquante de la Sécu ». Les arrêts de complaisance, elle « n'y croit pas ». « Nous n'avons pas juste envie de vider les caisses de la Sécu en arrêtant sans motif », affirme le Dr Isabelle de Ricaud à son interlocuteur.
La généraliste estime aussi que les statistiques devraient tenir compte des arrêts signés par ses remplaçants. « Moi qui prends moultes congés et ai un remplaçant tous les mercredis, j’aimerais connaître mes stats à moi », fait remarquer la praticienne. À la fin de cette visite d'une heure, le Dr de Ricaud était « satisfaite de ne pas s’être démontée ». Elle salue également le professionnalisme de son interlocuteur : « J'avais face à moi un médecin-conseil dans l'échange. Il a trouvé cet entretien enrichissant. Finalement, j’ai trouvé intéressant de pouvoir lâcher tout ce qu’on vit au jour le jour concernant les arrêts même si la Sécu est au courant et ne peut pas y faire grand-chose », conclut la généraliste.
Si vous voulez tout savoir sur l’entretien con-fraternel sur les arrêts de travail des vilains MG, ce thread va vous intéresser.
— docisa — no #fakemed— (@docisa33) 31 janvier 2019
(Et merci à ceux qui ont pris des nouvelles)
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