Comment a évolué, depuis sa création, la télé-transmission en France chez les médecins libéraux ?
Anne-Marie Troptard. La première idée du dispositif naît en 1978. Il y a eu ensuite pas mal de lois qui ont permis de faire avancer la télétransmission. Les ordonnances Juppé en 1996, par exemple, ont permis de vraiment accélérer la dynamique. C’est en 1998 que la première Carte Vitale a vu le jour. Ça a décollé assez vite avec les aides à l’informatisation mais, ensuite, avec les premiers bugs informatiques, les médecins ont fait marche arrière. Un dispositif de sanctions est ensuite apparu pour essayer de les pousser à plus télétransmettre. Ce que l’on constate, c’est que les médecins généralistes télétransmettent plus que
les spécialistes. Il y a toujours eu une grosse différence. En 2010, les spécialistes enregistraient un taux de 60% de télétransmission, contre 83% pour les médecins de famille.
Quelles sont les raisons qui poussent les médecins à se servir encore des FSP ?
A-M. T. Au départ, il y avait une résistance forte de la part des médecins car ils trouvaient que cela leur faisait perdre beaucoup de temps et d’argent. Cela demandait un certain investissement financier pour s’équiper. Ils avaient vraiment du mal à s’adapter. Au début, c’était eux le problème ! Aujourd’hui, c’est différent. Ce n’est pas un problème d’incitation des médecins car ils sont tous convaincus. L’obstacle c’est vraiment d’avoir la Carte Vitale physique dans les lecteurs. C’est ce qui ressort de ma thèse. C’est un problème de logistique. D’après mes résultats, dans 38,7% des cas, c’est parce que le patient n’a pas reçu de Carte Vitale de la CPAM. L’oubli de cette carte est cité par 36,8% des médecins interrogés sur leur dernier motif de non-télétransmission.
Il y a ensuite plein d’autres raisons comme le problème de lecteur portable quand on part en visite à domicile (5% des réponses). Il y a beaucoup de médecins qui n’ont pas investi dans ce dispositif car c’est très cher ou parce que le nombre de visites n’est pas toujours suffisant pour amortir le lecteur.
Comment y remédier ? Quelles solutions proposez-vous ?
A-M. T. Comme la première raison c’est l’absence de distribution de la Carte Vitale ou des retards, il faudrait, selon moi, changer le système. Tout simplement ! C’est un peu radical. Mais il faut aller vers la reconnaissance faciale ou vers les paiements « sans contact ». Par exemple, une puce dans le téléphone car tous les patients en ont un, même les personnes âgées, et ça, elles ne l’oublient pas ! Ou alors la mettre dans la carte bancaire. On n’aurait plus besoin des lecteurs. Les nôtres sont plus que vétustes. Cela engendrerait des frais supplémentaires mais cela serait plus optimal.
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