Mise en liquidation par le tribunal de commerce le 13 février, l’entité administrative et logistique du groupe Sagéo, Sagéo services, a dû arrêter toute activité des centres de santé dont elle était gestionnaire.
De fait, le centre de santé du Havre, ouvert en 2020, a fermé ses portes le 25 février 2025, laissant sur le carreau patients et personnels médicaux et administratifs. Cet établissement 100 % privé employait quatre médecins généralistes, deux sages-femmes et une infirmière. Selon la presse locale, 5 000 patients sont privés de médecin traitant. En réaction, les Havrais se sont mobilisés et ont sollicité l’aide du maire et ancien Premier ministre Édouard Philippe, qui doit recevoir le personnel le 27 février.
À Agen, la décision du tribunal de commerce a de fait entraîné la fermeture du centre de santé place Foch laissant 3 000 patients sans médecin traitant. Interrogé mardi 25 février par le journal Sud-Ouest, Sylvain Falinower, directeur santé de Sagéo services, a expliqué que « les budgets des hôpitaux et des centres de santé municipaux peuvent être abondés par des financements publics externes. Étant un groupe privé, nous ne le pouvons pas ».
Messages laconiques sur Internet
D’autres centres de la société, dont le site Internet est à l’arrêt, sont amenés à connaître le même sort. Sur les réseaux sociaux, les patients s’inquiètent de la fermeture du centre de santé Sageo Ivry. Sur les moteurs de recherche, celui de Montigny-lès-Cormeilles confirme par un message laconique qu’à la suite de « la décision du tribunal de commerce de Paris, le centre de santé ne pourra plus recevoir de patients à partir du 26 février et ce pour une durée indéterminée. Nous nous excusons pour la gêne occasionnée. Pour toute urgence, contacter le 15. » Là aussi, l’accès aux soins de plusieurs milliers de patients est menacé.
Des projets à l’arrêt dans une dizaine de villes
À Dieppe, le groupe privé avait signé en 2024 un contrat pour l’aménagement d’un pôle de santé de 400 m2, rappelle le 25 février Les Informations dieppoises. L’avenir du projet est donc compromis, de même que ceux sur lesquels le groupe communiquait il y a encore quelques mois pour les villes de Soissons, Melun, Cergy-Pontoise, Bourges, Noisy-le-Grand, Sens ou Argenteuil.
De plus en plus de gestionnaires font le choix d’arrêter l’activité des centres de santé déficitaires au lieu de réinvestir pour le bien de la population
Dr Frédéric Villebrun, co-président de l’Union syndicale des professionnels des centres de santé (USPCS)
Sollicité par Le Quotidien, le Dr Frédéric Villebrun, co-président de l’Union syndicale des professionnels des centres de santé (USPCS), ne cache pas sa déception. « C’est une nouvelle qui nous surprend toujours, explique le généraliste. De plus en plus de gestionnaires font le choix d’arrêter l’activité des centres de santé déficitaires au lieu de réinvestir pour le bien de la population. » Le syndicaliste rappelle que « vouloir gérer un centre de santé comme une entreprise privée et attendre des marges n’est pas possible ». Quant aux médecins et aux autres personnels salariés par la deuxième entité Sagéo santé, constituée sous forme d’association à but non lucratif, « ils vont être probablement licenciés, explique le Dr Villebrun. Les médecins vont pouvoir trouver localement des postes dans les centres de santé publics ou participatifs ».
Cette fermeture relance la question de la pérennité économique des centres de santé. Selon un récent rapport de l’Igas (Inspection générale des affaires sociales), seul un tiers de ces structures parviennent à dégager un résultat excédentaire, en raison de l’explosion des dépenses et une panne de recettes liée notamment à une productivité médicale jugée insuffisante et à un modèle de financement imparfait.
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