Remue-méninges estival des biologistes et des radiologues

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Publié le 04/07/2025
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Proposition de loi pour être reconnus en tant que profession médicale pour les uns, congrès inédit pour les autres… De concert, biologistes et radiologues s’organisent face à l’offensive tarifaire de la Cnam, toujours plus en quête d’économies.

Les radiologues se voient réclamer par la Cnam 300 millions d’euros d’économies d’ici à 2027

Les radiologues se voient réclamer par la Cnam 300 millions d’euros d’économies d’ici à 2027
Crédit photo : GARO/PHANIE

Il est 18 heures pile, ce mardi 17 juin, lorsqu’une trentaine d’adhérents du Syndicat des biologistes (SDBIO) prennent place dans une des salles du sous-sol du parc de loisirs urbain du Smile World de la Gaîté Montparnasse, à Paris, à l’invitation de leur président François Blanchecotte. L’ambiance est studieuse car il s’agit ni plus ni moins que d’engager une réflexion collective sur l’avenir de la profession. Deux thèmes sont au menu de la soirée. D’une part, dégager les axes possibles d’une future proposition de loi pour les biologistes. D’autre part, et c’est « la » question du moment : faut-il vraiment négocier un nouveau protocole avec l’Assurance-maladie, dans un contexte où le déficit abyssal de la Sécu fait craindre à la profession de nouvelles baisses tarifaires impromptues de la part de la Cnam ?

Manque de reconnaissance

« L'examen de biologie médicale constitue un acte médical complet très éloigné d'une simple production d'informations biologiques, à laquelle il est souvent assimilé », rappelle en préambule le chef de file de SDBIO. Or la profession est aujourd’hui rattachée dans le Code de la santé publique aux établissements et services de santé, et non aux professions de santé. « C’est un manque de reconnaissance et une forme d’exclusion qui ne sécurise pas notre métier », analyse une participante, qui voit d’un mauvais œil l’élargissement des compétences vaccinales des pharmaciens d’officine, qui risquent de « tailler des croupières » aux biologistes médicaux.

Être reconnu comme profession médicale permettrait à ces derniers de consulter et de prescrire en toute liberté dans les domaines spécialisés tels que l’antibiothérapie, l’hémostase, la PMA, la génétique ou encore les maladies rares. L’Ordre des médecins a d’ailleurs récemment donné son feu vert à une telle possibilité. Pour enfoncer le clou, le SDBIO travaille à l’écriture d’une proposition de loi qu’il espère voir défendue par les élus amis des biologistes.

Pour beaucoup de ministres, nous sommes juste des entreprises

François Blanchecotte, président de SDBIO

Pour être couronné de succès, ce texte doit être simple, s’appuyer sur une logique transpartisane et mettre en avant la réponse que la profession apporte aux Français dans leurs difficultés d’accès aux soins. Faire appel aux parlementaires plutôt qu’à l’exécutif, donc, pour obtenir cette reconnaissance ? « Pour beaucoup de ministres, nous sommes juste des entreprises », juge le président de SDBIO. Pour beaucoup de ministres et, en creux, pour l’Assurance-maladie.

Car la décision de la Cnam de baisser l’été dernier de près de 10 % les tarifs du secteur (pour une économie estimée à 360 millions d’euros par an) est encore dans les mémoires. Mais c’est surtout « la mauvaise foi » sur les chiffres avancés à l’époque par la Caisse pour justifier son choix qui ne passe toujours pas. Et justifie les envies d'en découdre du syndicat.

Montrer les muscles

Les biologistes médicaux ne sont pas les seuls à souffrir d’un coup de chaud. Le 20 juin, c’est au tour des radiologues de phosphorer sur la défense de la profession. Eux aussi sont dans le viseur de la Cnam, qui leur réclame 300 millions d’euros d’économies d’ici à 2027. Plus de 350 participants ont fait le déplacement à Paris à l’appel de la Fédération nationale des médecins radiologues (FNMR), organisatrice de la première édition du congrès Imagine.

Ambition affichée : montrer les muscles en dressant un panorama de la place fondamentale de la radiologie dans le système de soins et « rappeler tout ce qu’elle apporte au sein de l’écosystème économique médical, tant en matière d’innovation que d’économie de la santé », rappelle le Dr Jean-Philippe Masson, président du syndicat.

Mieux vaut prévenir que guérir face à la Cnam. « On sentait que l’orage commençait à gronder, l’imagerie étant au centre du diagnostic médical. Certes, elle génère un coût de six milliards d’euros de dépenses, mais son secteur libéral n’est responsable “que” de 3,4 milliards » sur des dépenses (Ondam) de ville de près de 114 milliards en 2025, toutes spécialités confondues, souligne le chef de file de la FNMR.

En outre, les radiologues libéraux ne sont pas responsables de l’ensemble des prescriptions d’imagerie, loin s’en faut. Les cardiologues et les généralistes sont entre autres à la manœuvre. « Sur 100 euros de nouvelles dépenses d’imagerie remboursées entre 2013 et 2023, 20,50 euros sont imputables aux radiologues », confirme, depuis l’estrade, le Dr Franck Clarot, membre du bureau national. Conséquence logique pour les spécialistes présents dans la salle : il serait injuste de les tenir responsables du dérapage des finances de la Sécu et de leur imposer de nouvelles baisses de tarifs. Pas sûr que la Cnam, qui a jugé la semaine dernière que la radiologie et la biologie sont deux disciplines bénéficiaires de « rentes de situation », en arrive à la même conclusion.

François Petty

Source : Le Quotidien du Médecin