Un médecin diplômé, le docteur L…, et une dame P… étaient poursuivis hier devant la 10e chambre du tribunal correctionnel pour exercice illégal de la médecine, le premier s’étant, d’après la prévention, écarté de ses attributions en utilisant le concours d’une somnambule, et celle-ci ayant, sans être munie d’un diplôme, indûment participé à la pratique de l’art de guérir.
Le docteur L…, dit le réquisitoire définitif, a pensé que des consultations médicales, données avec le concours, seraient de nature à inspirer une confiance particulière à une certaine clientèle et a loué, avenue d’Orléans, un cabinet médical où Mme P… se tient en permanence. Lorsqu’un client se présente, elle reste dans un état de sommeil et prescrit un traitement ; parfois, elle reste en état de veille ; d’autres fois, elle se borne à examiner le malade en même temps que le médecin et à se mettre d’accord avec lui pour l’indication du traitement.
Au cours de son interrogatoire, Mme P… a déclaré ne pas se souvenir de ce qui a pu se passer pendant les consultations du docteur L… Comment le pourrait-elle, puisqu’elle se trouvait alors en état d’hypnotisme ?
Quant au docteur L…, il s’est défendu de s’être fait dicter par sa coprévenue les termes de ses ordonnances.
- Je cherche, a-t-il dit, la lumière avant tout ; je crois pouvoir la trouver, en l’état actuel de la science, dans la bouche d’une personne endormie d’un sommeil magnétique. J’ai pu m’aider, m’inspirer d’elle, dans une certaine, mais sans méconnaître pour cela mon rôle et ma responsabilité de médecin.
Les dépositions des deux témoins présents à la barre, moins formelles qu’à l’instruction, sont notamment négatives sur la circonstance que le médecin aurait écrit ses ordonnances sous la dictée de son sujet. Une dame B… dépose en effet de la sorte :
- Des amis m’ont envoyée chez le docteur pour faire soigner mon mari paralysé ; j’y suis allé deux fois. La dame présente dans le cabinet du médecin s’est endormie en se frottant le front avec une alliance en or. Elle a ensuite examiné mon mari, s’est entretenue avec le docteur et a donné une consultation au malade, lui prescrivant du bromure, du vin de Banyuls et du baume de Fioraventi. Le médecin a fait une ordonnance, mais pas sous la dictée de la somnambule.
Mme M…, cuisinière, déclare à son tour :
- Je suis allée, le 5 janvier, voir le docteur L… pour des douleurs rhumatismales. La dame et le docteur m’ont examinée aux mains, ce dernier m’a ordonné du baume de Fioraventi, sans délivrer d’ordonnance. J’ai mis 5 francs sur la table comme payement.
Me Geoffroy, au nom du Syndicat des médecins de la Seine, a demandé contre les prévenus l’application de la loi et des dommages-intérêts. Après plaidoirie de Me Houard, pour les inculpés, le tribunal a condamné chacun d’eux à 200 francs d’amende, et tous deux solidairement au payement de 200 francs au Syndicat des médecins de la Seine, partie civile.
(Le Progrès médical, 1904)
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