Après l’arrêt du Conseil d’État rendu la semaine dernière, les médecins généralistes qui ne l’ont pas fait, doivent-ils signer un contrat avec leur Ehpad ? La question se pose alors que le Conseil d’État a annulé partiellement le décret et l’arrêté qui instituaient ces contrats. En théorie, tout médecin qui veut continuer de voir ses patients dans un établissement aurait déjà dû le faire depuis qu’en décembre 2010 un décret de Xavier Bertrand en a instauré le principe. En pratique, la fronde d’une partie de la profession a fait que, de report en délai de grâce, personne n’a finalement osé taper sur les doigts des récalcitrants. Et, au final, seule une partie de la profession semble à ce jour s’y être soumise.
Cette situation attentiste devrait prendre fin avec la décision de la Haute Juridiction rendue la semaine dernière. Saisi par le petit Syndicat des Médecins d’Aix et sa région (SMAER) et par le Conseil national de l’Ordre, le Conseil d’État a en effet remis les pendules à l’heure. En soi, il n’a pas supprimé les fameux contrats, mais il les cantonne désormais à trois objectifs précis : définir les modalités d’intervention du professionnel, la transmission d’informations et la coordination des soins dans l’Ehpad. Les dispositions les plus critiquables, donnant le droit au directeur d’Ehpad de se séparer d’un médecin libéral, sont, en revanche, censurées parce que contraires à la liberté de choix du patient.
Dans ce nouveau contexte, les médecins seront à nouveau nombreux à s’interroger. Pas le Dr Gilles Vidal pourtant. Car pour ce généraliste d’Aix-en-Provence, cheville ouvrière du SMAER, le doute n’est plus guère permis. « Les clauses contractuelles 6 et 7 qui mettaient les médecins en position de faiblesse ont été annulées. Je pense que cela permet aux médecins qui n’ont rien signé de ne pas contracter. Comme c’était, bien entendu, déjà le cas chez nous, à Aix ! »
La balle est dans le camp de la ministre
À l’inverse, la CSMF développe une argumentation opposée. « L’obligation pour le professionnel de santé libéral de conclure un contrat avec l’EHPAD demeure une obligation à la fois inscrite dans la loi et le code de l’action sociale et des familles », développe le syndicat de Michel Chassang. S’il se réjouit lui aussi des points censurés par le Conseil d’État, le chef de file de la CSMF rappelle que « les dispositions annulées n’entament pas la validité juridique des contrats déjà signés ». Et pour le reste met en garde ses confrères : « Ne pas signer est une folie. Car ce contrat est la garantie de l’intervention des médecins libéraux en maisons de retraite. À défaut, ce serait demain la porte ouverte au salariat ».
Dans cette affaire, on retrouve en fait les oppositions d’origine. Occasion donc pour MG France de prendre le contre-pied de la CSMF. « Le Conseil d’État a conforté la position de MG France et du SNGIE (Syndicat des médecins intervenant en Ehpad, ndlr), qui ont conseillé aux généralistes de boycotter les contrats », indique victorieux un communiqué du syndicat.
À la différence de la CSMF, son président, Claude Leicher, conseille donc aux généralistes qui n’ont pas signé de continuer à s’abstenir. Le président du syndicat laisse d’ailleurs entendre qu’une porte de sortie est possible. Il raconte qu’il a plaidé auprès de Michèle Delaunay, la ministre aux Personnes âgées, pour un conventionnement collectif commun à l’ensemble des Ehpad et des généralistes d’un secteur. À terme, MG France imagine d’ailleurs que d’autres activités auraient leur place dans ce conventionnement « Des contrats, il va y en avoir dans d’autres domaines, par exemple pour la PDS, la régulation ou les médecins correspondants SAMU », explique Claude Leicher, qui estime que pour éviter un véritable casse-tête aux généralistes, il faudrait regrouper la totalité des contrats en un seul conventionnement global.
Pour départager les uns et les autres, la réponse de l’avenue de Ségur est évidemment très attendue. À la CSMF, on estime que le gouvernement attendait cette décision du Conseil d’État pour relancer les médecins traitants récalcitrants. Et, de fait, après son arrivée au ministère, Michèle Delaunay, incitait, dans une interview au Généraliste, les médecins libéraux à signer. À moins que la solution proposée plus récemment par MG France ne l’ait convaincu de procéder autrement...
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique