Ils portent le même regard désabusé sur l’avenir de leur cabinet de groupe, sans perdre définitivement l’espoir d’un sauvetage in extremis. Les Drs Patrick Deville-Cavellin et Jean-Yves Crouzy ont également la même analyse sur les raisons du déclin économique des structures libérales dans lesquelles ils exercent.
Installé à Voisins-le-Bretonneux (Yvelines), ville de 10 000 habitants, le Dr Deville-Cavellin est un « retraité hyperactif » de 68 ans, qui exerce 55 heures par semaine au lieu des 70 de ses débuts. En 1984, ils étaient deux médecins généralistes et un chirurgien-dentiste. « À trois, on salariait une secrétaire à plein-temps. Aujourd’hui, nous sommes neuf, dont trois généralistes. Dans six mois, je serai le seul médecin et bientôt, le groupe sera réduit à cinq. Notre secrétaire sera licenciée, c’est certain. » La cause : la gestion et le poids des charges de ce 270 m2, qui augmentent de 5 % par an. Le Dr Deville-Cavellin sera bientôt le seul propriétaire des murs. Personne ne veut investir, et surtout pas les jeunes professionnels. Alors, s’il le faut, le médecin travaillera jusqu’à 75 ans, le temps que l’effet du numerus clausus se fasse sentir. Des aides de l’État, il en a bien besoin, mais pour ce grand libéral, « philosophiquement, ça ne passe pas ».
Pas de sang neuf
À Melun, préfecture de la Seine-et-Marne, le discours du Dr Crouzy n’est guère plus optimiste. Le cabinet de groupe dans lequel il exerce depuis cinq ans – après 14 ans en solo – est grand : trois étages pour neuf professionnels de santé, dont quatre médecins généralistes. Les paramédicaux ont déserté les lieux, les jeunes sont aux abonnés absents. « Estomaqué » par tous ces hôpitaux « bardés de professionnels », le Dr Crouzy se désole de la « grande menace » qui pèse sur son cabinet libéral. Pour lui, seul un coup de main de l’agence régionale de santé sur les frais de fonctionnement pourrait stopper l’hémorragie.
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