DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL
LES MÉDECINS DE L’union régionale de professionnels de santé (URPS) de Champagne-Ardenne organisait mercredi dernier, pour la deuxième année consécutive, une journée de l’installation en libéral, à laquelle ont assisté environ 200 carabins. Alternant ateliers sur des thématiques précises et séances plénières, le but avoué de cette manifestation, selon le Dr Élisabeth Rousselot-Marche, généraliste en milieu rural et présidente de l’URPS, était de redonner goût à un mode d’exercice boudé par les jeunes générations.
Damien Moreau, jeune médecin généraliste fraîchement installé dans un petit bourg à 20 minutes de Reims, donne le ton de la journée : « Après six mois d’installation, explique-t-il à l’assistance, mon bilan est très positif. En cinq semaines, j’ai obtenu ma plaque et mes ordonnances, je reçois environ 30 patients par jour et mes tâches administratives ne me prennent pas plus d’une demi-heure chaque soir. » Damien Moreau avait effectué son SASPAS (Stage ambulatoire en soins primaires en autonomie supervisée) dans le cabinet d’un médecin sur le départ, et a finalement choisi de reprendre sa patientèle.
Un cas qui n’est pas rare, selon le Dr Guy Vignon, un praticien d’une cinquantaine d’années qui se définit lui-même comme « généraliste rustique ». Au cours d’un atelier consacré à l’installation en milieu rural, il indique qu’une thèse réalisée en mai 2009 sur le retard d’installation en région Champagne-Ardenne a mis en évidence que 76 % des internes en médecine générale ayant effectué un SASPAS s’installent en libéral par la suite. Guy Vignon note un regain d’intérêt pour l’installation en libéral, notamment en zone rurale, et prévient les étudiants : « Plus tôt vous vous installerez dans une zone rurale attrayante, moins vous risquerez de vous faire piquer la place par un autre candidat. »
Rupture de ton.
Au cours du même atelier, le Dr Jean-Claude Reitz vante les mérites de l’exercice hors grandes villes : « Je suis installé en cabinet de groupe en zone semi-rurale, indique-t-il. À quatre ans de ma retraite, je n’ai pas du tout envie d’arrêter. Je fais presque partie de la famille de certains de mes patients et le cabinet de groupe nous permet de financer un secrétariat qui nous facilite la vie pour le travail administratif. » Le ton général est bien éloigné du discours habituel selon lequel les médecins libéraux sont noyés sous les tâches administratives. Une étudiante prend la parole pour dire qu’elle hésite à s’installer en Champagne-Ardenne, car elle redoute de devenir un jour le seul médecin du canton et de ne pouvoir faire face à l’afflux de patients. Le Dr Benoît Pingris, médecin rural et maître de stage, reconnaît que c’est sa « seule peur ». À la fin de l’atelier, auquel participent une trentaine d’étudiants, le Dr Rousselot-Marche demande qui envisage de s’installer en milieu rural. Sept étudiants, dont une majorité de femmes, lèvent la main.
Au cours de la séance plénière finale, les différents intervenants prennent la parole pour une synthèse des travaux. Le Pr Jacques Motte, doyen de la faculté de médecine de Reims, note que le nombre d’étudiants qui choisissent spontanément la médecine générale au cours de leur cursus est en hausse légère mais constante depuis plusieurs années. Jacques-Olivier Damberton, président d’AIMEG (Association des Internes de médecine générale de Reims) est optimiste : « Les choses bougent en faveur de l’installation libérale », croit-il savoir. Même tonalité chez le Dr Sylvain Duriez, président de Remplachamp, une association locale de médecins remplaçants : « On sent un frémissement, assure-t-il, même si ce n’est pas encore un tsunami. Les jeunes s’installent plus tôt. Ils reprennent goût à l’installation. » Une interne en médecine générale, manifestement conquise par cette journée de l’installation, paraît décidée à la sortie de l’amphithéâtre : « La nature a horreur du vide, confie-t-elle au « Quotidien ». Il y a aujourd’hui tellement de zones déficitaires en offre de soins qu’il y en a forcément où ça peut être sympa de s’installer. On y est souvent reçu comme le Messie, et si on s’y installe en groupe, on peut même avoir des honoraires majorés de 20 %. Ca fait réfléchir. »
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