En présentant pas moins de 50 « clés de déverrouillage » destinées aux candidats à la présidentielle, la Fédération hospitalière de France (FHF) se pose en acteur incontournable mais prend le risque de raviver les tensions avec la médecine de ville.
Son programme 2017/2022 se veut décapant. Fruit d'une consultation en ligne et d'un tour de France, cette plateforme hospitalière n'hésite pas à réclamer davantage d'encadrement… pour le secteur libéral ! La première pique, classique, concerne la liberté d'installation. La FHF milite pour une forme de conventionnement sélectif en interdisant l'installation en secteur II dans les zones déjà sur denses, tout en préservant la liberté d'installation en secteur I.
Tâches à hauteur valeur ajoutée
Pour enrayer la pénurie médicale dans les hôpitaux et « mettre fin aux situations de concurrence déloyale » dans les spécialités en crise d'attractivité, la FHF veut pouvoir « se battre à armes égales » avec le privé. Comment ? En instaurant un « plafonnement législatif des rémunérations dans le secteur privé ». En clair, dans les disciplines en tension, la loi encadrerait les écarts de rémunération entre les PH et le secteur libéral.
Autre idée : rendre obligatoire la participation des libéraux à la permanence des soins. « Dans le secteur de l’imagerie, illustre la FHF, aucune nouvelle autorisation d’équipement ne devrait pouvoir être donnée dans le secteur privé sans formalisation d’un engagement de participation des professionnels libéraux à la permanence des soins. »
Quant aux compétences des paramédicaux, elles doivent être accrues, poursuit la fédération hospitalière. Cela permettra « non seulement de concentrer le travail médical sur les tâches à haute valeur ajoutée mais également de donner aux Français de nouvelles possibilités d'accès aux soins. »
« De quoi je me mêle ? », s'insurge la CSMF
Certes, la FHF avance aussi des mesures fortes pour l'hôpital public : éradiquer les abus en matière de dépassement d'honoraires des PH ; créer un « dispositif d’intérim parapublic à honoraires maîtrisés » ; imaginer des outils de valorisation du mérite ; instaurer d'un système d'intéressement collectif pour les équipes médicales ; relancer le chantier de la pertinence des actes ou prévoir un dispositif d'« autonomie avancée » pour les hôpitaux volontaires…
Il n'empêche. Les médecins de ville ont peu apprécié les recommandations de la FHF. « De quoi je me mêle ? », s'agace le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. « Alors que le chantier hospitalier est immense, il est surprenant que les propositions de la FHF s’intéressent aussi à la médecine de ville », juge le leader confédéral. « Proposer de plafonner les rémunérations revient à étatiser l’ensemble du secteur libéral », résume-t-il. Pour le Dr Jérôme Marty, président de l'UFML, « l'attaque de Frédéric Valletoux contre les médecins libéraux est intolérable ».
Le patron de la puissante FHF assume son approche globale dans la construction de sa plateforme présidentielle. « On aurait fait une grande erreur en ne regardant que l'hôpital, explique au « Quotidien » Frédéric Valletoux. On ne peut pas parler de l'hôpital de demain sans parler de l'ensemble des acteurs. Les dysfonctionnements de la médecine de ville pèsent sur l'hôpital. Il faut faire tomber les passerelles entre les uns et les autres si on veut fluidifier le parcours du patient (...). Il y a une responsabilité collective nouvelle. » À bon entendeur.
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