TANDIS que des milliers de personnes profitaient de la fête de la science à l’étage supérieur, une centaine de jeunes généralistes et d’experts du monde de la santé s’étaient donné rendez-vous à la cité de la Science à Paris, à l’occasion des premières assises nationales du Syndicat national des jeunes médecins généralistes (SNJMG). L’objectif de cette rencontre était de trouver des pistes pour améliorer l’attractivité de la médecine générale à l’heure où les troupes se dégarnissent et où la relève tarde. « Nous assistons à une inversion de la pyramide des âges des généralistes en activité, explique le Dr Jean-Marc Brasseur, de l’Ordre des médecins. Âgés de 52 ans en moyenne, près d’un généraliste sur 4 est susceptible d’arrêter son activité professionnelle d’ici à 2017 ».
« Ces chiffres font peur, analyse Emmanuel Bagourd, président de l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG). Mais pourquoi ne s’installe-t-on pas ? La première raison est simple : on ne s’installe pas dans un territoire qu’on ne connaît pas ». Le jeune interne rappelle l’impérieuse nécessité de développer les stages de médecine générale en ambulatoire. Selon lui, le désamour du libéral n’est pas une fatalité. La preuve, une récente enquête de l’association des internes de médecine générale de Rennes (AIEMGR), qui a recueilli 120 réponses, montre que 43 % des futurs généralistes souhaitent avoir un exercice libéral exclusif, 28 % veulent une activité mixte (libérale et salariée) tandis que 26 % n’ont pas fait leur choix.
La question de l’aménagement du territoire demeure un élément clé. « Nous ne voulons pas nous installer seuls dans un territoire, poursuit Emmanuel Bagourd. S’il n’y a pas de crèche, d’école ou de travail pour le conjoint, cela ne marchera pas. Le modèle du médecin généraliste qui bosse 70 heures par semaine avec sa femme comme secrétaire, c’est fini ! D’abord, parce que le médecin est une femme. » Rires dans l’assistance majoritairement féminine. « Libéral ou salarié, ce n’est pas le problème, vous voulez des secrétariats, travailler en coordination », affirme le Dr Claude Leicher, président de MG France, qui fustige le manque d’investissement des pouvoirs publics dans les soins primaires.
La peur de se lancer.
Et les jeunes généralistes, qu’en pensent-ils ? Après la table ronde politique, les débats se poursuivent dans un atelier consacré à l’installation. Une trentaine de jeunes généralistes font face au Dr Didier Ménard, médecin généraliste qui a contribué à l’ouverture d’une maison de santé dans la cité des Francs-Moisins à Saint-Denis. L’échange est libre, le tutoiement de rigueur. Les questions, relativement naïves, portent sur la création ou le rachat d’un cabinet, le choix du lieu d’exercice ou les aides potentielles. Un jeune diplômé expose son projet de devenir maître de stage, de s’installer et de trouver des associés : « Vu les sommes qu’on m’a demandées pour reprendre une clientèle et les normes handicapées à respecter d’ici 2015, j’ai perdu le moral et j’ai laissé tomber ».
La discussion s’attarde sur l’exercice collectif. « Comment choisir ses associés ? », demande ingénument un participant. « C’est pire qu’un contrat de mariage, explique François-Charles Cuisigniez, président de la CSMF Jeunes. Il ne faut pas s’installer avec des personnes qu’on ne connaît pas sinon tu t’exposes à de graves déconvenues. »« Les projets naissent d’histoires collectives avec des amis de fac ou de rencontres dans des groupes de formation continue, ça ne se passe jamais en se connectant à un Meetic de l’installation », ajoute Didier Ménard.
La discussion s’anime. Quelqu’un observe que la durée d’attente entre le remplacement et l’installation est de plus en plus longue. « Quand sait-on qu’on est prêt ? »« Ce qui freine l’installation, c’est la peur de se lancer, de se tromper car on ne se sent jamais prêts, explique Didier Ménard. S’installer, c’est prendre un risque et aujourd’hui, on essaie de limiter au maximum le risque ». La raison est souvent financière. « Au début, tu gagnes plus en étant remplaçant que pendant tes premières années d’installation », remarqueune généraliste toulousaine. « Au fait qui a un projet d’installation ? », demande Didier Ménard à l’issue du débat. Six mains se lèvent timidement.
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