« Ils sont nombreux ceux qui, à l'approche de la retraite, pleurent sur les jeunes qui ne veulent pas venir, mais ne font rien pour aider à la relève ».
Le Dr Éric Mener, généraliste breton, cité par Paul Goupil dans son livre « Qui va nous soigner ? La délicate relève des médecins généralistes » (Ed. Dialogues)*, illustre bien la philosophie sous-jacente à l'ouvrage : « Ce sont les professionnels de santé eux-mêmes qui détiennent la clé du changement en cours ».
Journaliste à Ouest-France, Paul Goupil a parcouru la Bretagne en long, en large et en travers entre 2013 et 2015 pour recueillir la parole de ces omnipraticiens bretons, parfois conservateurs, très souvent innovateurs qui tentent de redonner vie à des territoires ruraux parfois désertés.
Galerie de portraits
Maître de stage depuis 2000, Éric Mener a accueilli une bonne cinquantaine d'internes dans son cabinet. Il est animé d'une certitude : « la maîtrise de stage est essentielle car l'interne qui voit notre façon de travailler peut se dire : ça me plairait de bosser avec eux ».
De son côté, et sans aucune subvention, Nicolas Thual a mené à bien son projet de pôle de santé pluridisciplinaire à Bréhan dans le Morbihan, malgré le scepticisme ambiant. Mais, revers de la médaille, le succès du pôle a fait des émules et des projets publics aux alentours de Bréhan fragilisent sa belle construction.
On y côtoie aussi le Dr Éric Henry, patron du Syndicat des médecins libéraux (SML), et généraliste à Auray. Coutumier des « journées de 30 heures », bouillonnant d'idées, Éric Henry a mis en pratique à Belle-Ile en Mer son projet de médecin volant (vacations de médecins dans des cabinets ou des maisons de santé pluridisciplinaires implantés dans des zones sous dotées).
Ou encore le Dr Hervé Le Néel, qui était président (CSMF) de l'URPS de Bretagne à l'époque où le livre a été rédigé. Ce généraliste est animé par une certitude : « quand on sollicite les libéraux, on trouve de l'enthousiasme, même chez ceux de 60 ans ». Les libéraux peuvent déplacer des montagnes quand on n'essaie pas de leur imposer un point de vue, quand on les motive au lieu de les contraindre.
L'exercice coordonné, clé d'un projet de santé
Le livre ne répond pas à la question qu'il pose dans son titre. Tout au plus nous rappelle-t-il qu'« à l'avenir, les petites communes n'auront plus de médecin ». Mais à défaut de solution miracle pour repeupler les déserts médicaux, il propose quelques pistes. Monter un projet de maison de santé nécessite l'association des professionnels de santé et des élus. Les premiers doivent mettre en place le projet médical, et seulement alors les élus peuvent monter le projet immobilier.
L'auteur souligne aussi la nécessité pour ces professionnels de santé d'avoir un exercice coordonné, clé de la formalisation d'un vrai projet de santé. Il insiste enfin sur le « rôle primordial » des leaders au sein des professions de santé : « Ils pèsent parfois davantage qu'un ministre parce qu'ils auront suscité cette contamination de proximité qui déplace les lignes ».
« Qui va nous soigner ? La délicate relève des médecins généralistes », de Paul Goupil, Ed. Dialogues, 148 pages, 16 euros
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